Cette année, un printemps et un été pervers se sont abattus sur les eaux américaines, synonyme de mort et de destruction.
D’abord, on a appris que dans les Grands Lacs, des milliers de poissons d’eau douce mourraient des suites d’une septicémie hémorragique virale, causant des hémorragies internes.
Puis, ce sont des scientifiques qui ont rapporté que le crabe chinois s’implante dans les baies de Chesapeake et de Delaware, en menaçant des populations de crabe existantes déjà fragiles et en contribuant à l’érosion de sol.
Et pendant tout l’été, les défendeurs des lacs Adirondack, au nord de l’Etat de New-York, ont lutté contre le myriophylle en épis (Myriophyllum spicatum L.), une « herbe fibreuse » qui évince rapidement les plantes aquatiques déjà présentes.
Cette « pollution vivante » a été particulièrement visible et, dans le cas de la septicémie hémorragique virale, affreuse cette année.
Mais ce n’est pas nouveau. Pendant des décennies, les gens qui vivent sur le littoral se sont battus pour éradiquer ou limiter le développement des plantes étrangères, des animaux et des micro-organismes qui entrent chaque année par milliards aux États-Unis via les navires internationaux.
Le lest : principal facteur de pollution
Aux Etats-Unis, le coût annuel pour essayer de contrôler les « envahisseurs » aquatiques est d’environ 9 milliards de dollars. Ce chiffre continuera à augmenter, tout comme le taux de nouvelles espèces envahissantes, à moins que les gouvernements locaux et fédéraux collaborent pour réguler leur source primaire : l’eau de lest.
Il s’agit d’eau de mer embarquée, par exemple, avant le départ pour stabiliser le bateau et sa cargaison. A destination, cette eau et, avec elle, toutes les bactéries, virus et organismes qu’elle contient, sont rejetés à la mer. L’eau de lest d’un navire simple peut contenir jusqu’à 4 000 espèces uniques de plantes, d’animaux ou de micro-organismes, en incluant ceux qui représentent une menace pour l’homme.
Les Grands Lacs fortement touchés
Beaucoup d’études menées sur les espèces envahissantes aquatiques se sont intéressées aux Grands Lacs à cause de la circulation importante de navire et de réserves d’eau douce. Les Grands Lacs possèdent près de 20% de l’eau douce disponible dans le monde et sont une source d’eau potable pour les millions de personnes. Plus de 160 poissons, plantes et espèces parasites « envahissants » infestent les Grands Lacs. Les chercheurs découvrent une nouvelle espèce « envahissante » tous les huit mois. Par conséquent, la diversité biologique des lacs et la qualité d’eau paient un lourd prix, tout comme l’économie de la région.
La lamproie marine, qui est d’abord apparu dans le Lac Erie en 1921, a porté préjudice à la pêche commerciale de la truite et du doré jaune (une espèce proche du sandre) dans les Grands Lacs. Le gobie à taches noires et la grémille menacent la perche, l’achigan à petite bouche et le méné émeraude, natifs des Lacs. Ceci nuit à l’industrie de la pêche et au tourisme lucratif qui représentent dans la région des grands Lacs 4,5 milliards de dollars. Le prix du contrôle et des réparations des dommages représente annuellement 5,7 milliards de dollars dans la région.
La réaction des Etats
Les Grands Lacs ne sont pas les seuls concernés par le problème. A l’échelon national, le Congressional Office of Technology Assessment a estimé ces pertes environnementales causées par les poissons « envahissants » à 1 milliard de dollar par an; celles causées par les arthropodes à 2,13 milliards de dollars; et celles causées par les mollusques à 1,3 milliards de dollars. La Baie de San Francisco est le refuge de 234 espèces « envahissantes », soit 90% de la population aquatique de la baie. Et les bactéries de choléra présentes dans l’eau de lest ont été libérées par les navires dans les baies de Chesapeake et de Mobile.
L’Etat du Michigan a pris une mesure qui empêche les bateaux de déverser l’eau de lest contaminée dans la mer. Les compagnies de navigation ont essayé de défier la loi du Michigan. La cour fédérale américaine a donné l’autorisation aux autres Etats pour faire de même.
Mais le gouvernement fédéral a également la responsabilité de lutter contre les espèces envahissantes. La cour de justice fédérale californienne a tenu à ce que le Clean Water Act s’applique à de l’eau de lest et a ordonné que l’Agence de Protection de l’Environnement régule ces évacuations d’eau.
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