Magnifique rivière sauvage du Sud de la Corse, le Rizzanese vit ses derniers instants de liberté quasi intacte. Le chantier d’un barrage hydroélectrique de 40 mètres de haut, vient de commencer. Le WWF et bon nombre d’associations dénoncent cette réalisation d’un autre temps qui selon eux, ne constitue en aucun cas une réponse durable au problème énergétique de la Corse.
Avec un coût estimé à 150 millions d’euros, cet ouvrage d’une capacité de 1,3 millions de
m3, prévu pour produire 80 GWh d’électricité par an, ne couvrira que 4 % des besoins en électricité de l’île, pour un coût écologique démesuré.
Or, le barrage est une menace directe sur les populations de poissons locales et migratrice, dont la truite macrostigma, une espèce endémique de Corse et l’anguille, déjà fortement menacée : le Rizzanese, dont une partie de l’eau a déjà été détournée pour alimenter le barrage de l’Ospedale, va être mis sous canalisation sur 12 kilomètres, empêchant l’anguille de remonter sur les affluents de la rivière. Ce réservoir d’eau servirait aussi aux besoins agricoles (fourrage et élevage extensif des vaches) et à l’irrigation, à l’heure où les politiques agricoles et énergétiques sont en pleine évolution.
Un grand barrage de trop, au moment du Grenelle de l’environnement
L’ADRE, l’Association de Défense du Rizzanese et de son Environnement et les nombreuses
associations locales – dont la Fédération de Pêche de Corse – et la commune de Zonza, qui se battent depuis plus de 20 ans, n’ont pu empêcher le coup d’envoi juridique de ce projet, critiqué par de nombreuses institutions. Même EDF reconnaît, d’après l’ensemble des études d’impacts réalisées à ce jour en Corse, la richesse inégalée de la faune et de la flore du Rizzanese.
Comme pour les 45 000 grands barrages construits dans le monde, celui sur le Rizzanese va profondément et de façon irréversible modifier le cours d’eau, ses paysages de gorges et l’économie touristique, principalement développée autour de la pêche récréative et des sports d’eau vive. Les guides de pêche et des sportifs de renommée internationale considèrent le Rizzanese comme la plus belle rivière de Corse. Mais les plages locales, en particulier celles au sud de Propriano, inventoriées au titre de Natura 2000, vont aussi être endommagées suite blocage des sédiments par le barrage.
Pour un parc éolien
Tous ces dégâts pourraient être évités d’une part en développant une agriculture de qualité et
d’autre part en misant sur les autres énergies renouvelables (solaire, bois, énergie, éolien) pour produire une réelle électricité renouvelable. Ainsi, la création d’un parc éolien d’une vingtaine de machines de 1,5 MW chacune peut produire autant de courant électrique que le barrage, avec une empreinte écologique bien moindre sur les milieux naturels et la création de nombreux emplois. Provisoirement, un raccordement peut-être effectué sur le câble d’alimentation Italie-Sardaigne.
« Alors, ne renouvelons pas les erreurs du passé et tirons les leçons du retour d’expérience
dramatique du barrage de Puylaurent en Lozère, qui a détruit la dernière grande rivière à truite de la Lozère et a accéléré l’exode rural » déclare Daniel Richard, Président du WWF.
L’exemple de la Loire a démontré la pertinence de l’approche de « gestion durable des fleuves ». La Corse peut déjà compter sur un parc hydroélectrique important qui fournit 30 % de la demande annuelle en électricité et la place à la pointe en termes d’énergie renouvelable hydroélectrique, bien au-dessus de la moyenne nationale, de 13 % environ.
C’est pourquoi, le WWF et ses partenaires demandent à EDF et aux élus corses d’arrêter le
chantier et de lancer au plus vite l’étude pour les alternatives économiques, environnementales et sociales à cet énième barrage.
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