La Commission européenne a dévoilé mercredi une initiative politique majeure visant à éliminer les activités de pêche illégales en s’attaquant au principal facteur à l’origine de son développement: la perspective de profits à court terme.
Au mépris de toutes les lois, la pêche illicite, non-déclarée et non réglementée (INN) appauvrit les stocks de poissons, détruit les habitats marins, entraîne une distorsion de concurrence pour les pêcheurs honnêtes et affaiblit les communautés côtières, notamment dans les pays en développement.
L’Union européenne, en sa qualité de principale puissance dans le secteur de la pêche et de premier marché mondial des produits de la pêche, a un rôle majeur à jouer dans la lutte contre ce fléau. Les mesures proposées mercredi limiteraient l’accès au marché de l’UE aux seuls produits de la pêche certifiés conformes à la réglementation par l’État du pavillon ou par l’État d’exportation concerné.
Tolérance zéro
Il est également prévu d’établir une liste noire européenne des navires pratiquant la pêche INN et des États qui se montrent complaisants à leur égard ainsi que des sanctions dissuasives à l’encontre des activités INN pratiquées dans les eaux de l’UE et des opérateurs de l’UE qui s’adonnent à ce type de pêche partout dans le monde.
La lutte contre la pêche illégale s’inscrit dans le cadre plus large de la politique de l’UE en faveur de l’exploitation durable des mers qui sous-tend la proposition de la Commission relative à une politique maritime intégrée, adoptée la semaine dernière. Le train de mesures présenté aujourd’hui comprend une communication et une proposition de règlement du Conseil.
Joe Borg, membre de la Commission chargé de la pêche et des affaires maritimes, a déclaré à ce sujet: « Il faut appliquer le principe de la tolérance zéro à l’égard de la pêche pirate qui ne récompense que ceux qui pillent les ressources halieutiques. Le reste du monde en revanche souffre des conséquences de la pêche INN, responsable de la surpêche, de la destruction des habitats marins et de la concurrence déloyale. Seule une action déterminée menée à l’échelle mondiale, un engagement total et une coopération entière à tous les niveaux seront capables de venir à bout de ces pratiques inacceptables. L’UE doit montrer l’exemple, et c’est ce qu’elle fait aujourd’hui en soumettant ces nouvelles propositions« .
Causes et ampleur du phénomène
Avec un chiffre d’affaires global estimé à 10 milliards EUR par an, la pêche INN rivalise avec les principaux producteurs mondiaux en termes de valeur. Les importations dans l’UE de produits issus de la pêche INN ont été estimés, au bas mot, à plus de 1,1 milliard EUR. La communication de mercredi décrit les causes et l’ampleur du phénomène, les dommages qu’il occasionne, son impact sur l’UE, les efforts consentis jusqu’à présent pour l’enrayer ainsi que les nouvelles actions qui s’imposent. Trois principaux défis sont à relever:
– Repérer, prévenir et sanctionner les importations de produits INN dans l’UE.
– Dissuader non seulement les opérateurs INN mais aussi les États qui pratiquent ou tolèrent la pêche INN.
– Faire en sorte que les règles applicables à la pêche soient mieux respectées dans les eaux de l’UE et par les ressortissants de l’UE lorsqu’ils pêchent hors desdites eaux.
Principe de contrôle par l’Etat du port
La fermeture du marché de l’UE aux produits illicites reposerait principalement sur l’application du principe du «contrôle par l’État du port». Á l’avenir, tous les produits de la pêche importés dans l’UE, à l’état frais, congelé ou transformé, devraient être préalablement certifiés par l’État du pavillon (État d’immatriculation du navire responsable des captures) qui attesterait ainsi que les produits sont licites et que le navire concerné est titulaire des licences, permis et quotas requis.
L’accès aux installations portuaires de l’UE pour les navires des pays tiers serait limitée à un nombre de ports désignés figurant sur une liste établie par chaque État membre. Les transbordements entre navires de pays tiers et navires de l’UE seraient par ailleurs interdits en mer et pourraient uniquement avoir lieu dans les ports désignés.
Des certificats de capture validés
Les certificats de capture validés, délivrés par l’État du pavillon, devraient ensuite accompagner les produits de la pêche tout au long de la chaîne d’approvisionnement, afin de faciliter le contrôle du caractère légal des captures, même lorsque celles-ci transitent par plusieurs territoires, notamment pour y subir diverses transformations, avant d’arriver sur le marché de l’UE.
Pour dissuader les opérateurs INN et les États complaisants à leur égard de pratiquer ce type de pêche, il convient d’introduire un mécanisme européen de liste noire. Les relations en matière de pêche, y compris la commercialisation des produits de la pêche, entre les États membres de l’UE et les États non coopérants, seraient interdites. Dans les deux cas, les procédures relatives à l’établissement des listes incluront des mesures de sauvegarde et des mécanismes de recours pour garantir un traitement équitable des navires et des États concernés.
Un devoir qui s’applique à tous
Le respect des règles est un devoir qui s’applique à tous. La proposition de règlement renforcera par conséquent le pouvoir coercitif des États membres à l’égard de leurs ressortissants qui pratiquent la pêche INN en dehors de l’UE ou qui la facilitent. Il fixera également des mesures visant à harmoniser les sanctions maximales applicables par les États membres en cas d’infraction grave aux règles de la PCP.
L’élimination des activités INN passe aussi par une meilleure coopération en matière d’enquêtes. La Commission considère que l’agence communautaire de contrôle des pêches (ACCP) a un rôle central à jouer dans ce domaine. La Commission propose aussi d’intensifier les efforts de l’UE sur la scène internationale en vue d’élaborer des instruments de contrôle, de renforcer l’action des organisations régionales de gestion de la pêche dans le domaine de la lutte contre la pêche INN et d’aider les pays en développement à améliorer leur gestion de la pêche et leurs capacités de contrôle.
Les pays en développement figurent parmi les principales victimes de la pêche INN. C’est aussi souvent le cas des équipages embarqués à bord des navires pratiquant la pêche INN. La Commission souhaite donc encourager la ratification rapide de conventions internationales sur les conditions à bord et sur la sécurité de ces navires.
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