La France a comblé son retard dans la surveillance des effets de l’amiante

amiante.JPGMême si il reste beaucoup de choses à faire, la France a « aujourd’hui largement comblé » son retard dans le domaine de la surveillance épidémiologique des effets de l’exposition à l’amiante, a indiqué le professeur Marcel Goldberg, de l’Institut de veille sanitaire (InVS), dans l’éditorial du Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) publié mardi.

Selon lui, les dangers de l’amiante étaient connus depuis longtemps, mais en France, « la première réglementation en milieu de travail date de 1977 et l’interdiction de l’importation et de l’utilisation de l’amiante a été promulguée en 1997, alors que huit pays avaient déjà pris une telle mesure« .

L’amiante est responsable de mésothéliomes ou cancers de la plèvre, de cancers du poumon et « très vraisemblablement de cancers du larynx« , ainsi que d’autres pathologies comme l’asbestose, ou les plaques pleurales, a ajouté l’épidémiologiste chargé du programme national de surveillance du mésothéliome (PNSM) lancé en 1998.

Le suivi qui porte actuellement sur 18 millions d’habitants dans 22 départements, soit 30% de la population française, permet d’estimer à 500 à 611 le nombre annuel moyen de nouveaux cas chez les hommes. Il se situerait entre 148 et 188 chez les femmes dans les départements concernés par le programme de surveillance.

83% des hommes exposés à l’amiante

La part attribuable à une exposition professionnelle à l’amiante chez les hommes serait supérieure à 83%. Sur la France entière, le taux d’incidence serait d’environ 2 cas pour 100 000 hommes, et d’environ 0,5 cas pour 100 000 femmes.

Etant donné que ce cancer peut apparaître entre 20 et 45 ans après une exposition à l’amiante, « l’épidémie de mésothéliome devrait continuer de se développer pendant au moins deux ou trois décennies dans notre pays« , ont conclu Marcel Goldberg, Ellen Imbernon, et leurs collègues.

Les retraités qui ont été exposés à l’amiante durant leur vie professionnelle font l’objet de programmes visant à les repérer afin de leur permettre de bénéficier d’une surveillance médicale, mais également à des fins d’étude épidémiologique.

Lancé en 2006, le programme Spirale concerne plus de 50 600 hommes nés en 1942 et 1943, tandis que le programme Espri porte, depuis 2005, sur 2 334 artisans ayant pris leur retraite en 2004. Plus de la moitié d’entre eux ont déclaré avoir été exposés à l’amiante au cours de leur vie professionnelle.

Pic de décès atteint entre 2010 et 2020

Selon Paolo Boffeta, spécialiste du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC/OMS), « un maximum de décès attribuables au mésothéliome pleural » devrait avoir lieu « entre 2010 et 2020 » en Europe de l’Ouest, alors qu’aux Etats-Unis, le maximum de cas aurait été atteint en 2000.

Dans les pays développés, le taux d’incidence serait compris entre 0,5 et 2 cas pour 100 000 habitants chez les hommes (entre 0,2 et 0,5 pour 100 000 femmes). Le taux grimperait à 5 pour 100 000 dans les régions à forte exposition à l’amiante (autour de Gènes en Italie, ouest australien), a-t-il ajouté.

Ces taux sont beaucoup plus faibles dans les pays en développement, où l’utilisation de l’amiante, plus récente, n’est pas encore « une pratique du passé« , a alerté Marcel Golberg.

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