L’eau du robinet pourrait-elle être l’un des facteurs responsables du développement de la maladie d’Alzheimer ? Selon certains experts et médecins, il y aurait un lien entre les sulfates d’aluminium (alun) utilisés pour épurer l’eau et le développement de la maladie d’Alzheimer.
Selon ces professionnels, le scandale serait encore plus important que celui de l’amiante. Pourtant, si lors du Grenelle de l’environnement, les thèmes de l’eau potable, des pesticides, des nitrates, des phosphates… ont été abordés, les sulfates d’aluminium utilisés depuis longtemps dans les usines de traitement pour clarifier l’eau ont été oubliés. Selon « L’Expansion » à paraître le mois prochain, « le débat d’experts n’a pourtant jamais été tranché ; le doute subsiste et le dossier paraît aujourd’hui enterré« .
En 2000, des chercheurs du laboratoire U330 de l’Inserm à Bordeaux ont publié les premières conclusions d’une étude portant sur la concentration d’aluminium dans l’eau et les risques de déclenchement de la maladie d’Alzheimer dans l’American Journal of Epidemiology. Pendant huit ans, une équipe de scientifiques a suivi l’état de santé de près de 4.000 personnes.
Un risque accru ?
« Nous avons conclu à l’époque que le risque de développer la maladie était multiplié par 2,2 dans les communes où les concentrations d’aluminium étaient supérieures à 100 microgrammes par litre« , a expliqué le Dr Jean-François Dartigues, l’ancien patron du laboratoire, alors que depuis 1998, dans l’Union européenne, la valeur limite d’aluminium dans l’eau est fixée à 200 microgrammes par litre.
« A ce jour, il n’est pas possible de considérer que l’aluminium a un rôle causal dans la maladie d’Alzheimer« , a conclu l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) dans un rapport rendu 3 ans plus tard. Selon le magazine, « entre-temps, l’équipe bordelaise a été dissoute, le laboratoire U330, renommé U593, et les chercheurs ont été invités à exercer leurs talents sur d’autres sujets de recherche« .
« J’ai fait à l’époque un certain nombre de réserves sur les conclusions de ce rapport. Au nom du principe de précaution, on aurait dû décider d’utiliser d’autres substances que les sels d’aluminium, comme les oxydes de fer, pour lutter contre la turbidité de l’eau« , a indiqué le toxicologue Maurice Rabache, ancien membre de l’afssa, à « L’Expansion ». « Il aurait fallu lancer une nouvelle étude épidémiologique sur un échantillon beaucoup plus large et durant une dizaine d’années, mais ça coûte très cher, au moins 1 million d’euros par an« , a ajouté le Dr Dartigues au magazine.
Abaisser la valeur limite à 50 µg/l
« L’absorption d’aluminium dans l’organisme par le biais de l’eau reste très faible, et il est extrêmement difficile de mesurer l’exposition totale d’un individu pour des raisons techniques et scientifiques« , a déclaré à « L’Expansion » le Dr Sébastien La Vieille, de la Direction de l’évaluation des risques nutritionnels et sanitaires.
« Ni les chimistes ni les toxicologues spécialisés dans les complexes alumineux n’ont été consultés par l’Afssa. Il est indispensable d’abaisser la valeur maximale de concentration d’aluminium dans l’eau à 50 microgrammes par litre« , a indiqué au magazine Henri Pézerat, toxicologue et directeur de recherche honoraire au CNRS. Selon des chercheurs canadiens, une telle mesure permettrait de réduire de 23% le risque de développer la maladie d’Alzheimer.
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