Guy Nègre, PDG fondateur de la société MDI et inventeur d’un moteur à air comprimé.
Comment avez-vous eu l’idée de créer un moteur à air comprimé ?
C’est une succession d’idée. C’est en recherchant des solutions pour réaliser un moteur « propre ». Ça ne vient pas comme ça, d’un seul coup. C’est toute une évolution. J’avais fait un moteur thermique à trois chambres. Pour arriver à ce résultat, il faut vraiment beaucoup de travail de réflexion.
Quelles sont ses caractéristiques (performances, autonomie…) ?
Nous avons créé un moteur à air comprimé, c’est un dispositif de détente avec travail de bon rendement. Nous allons mettre en place plusieurs véhicules, mais nous allons surtout mettre en place deux modes principaux de fonctionnement : le moteur à air comprimé pur pour circuler en ville et le moteur à air comprimé plus un adjuvant, donc « bi-énergie », pour pouvoir circuler sur la route.
Pour rouler en ville avec de l’air comprimé, nous allons caler la voiture pour qu’elle puisse rouler jusqu’à 50 km/h. Mais, nous pouvons faire ce que nous voulons au point de vue puissance, il suffit de modifier les paramètres du moteur… Lorsque nous circulerons sur la route, nous limiterons volontairement la vitesse de la voiture à 150 km/h, puisque de nos jours cela ne sert plus à rien d’avoir une voiture qui roule vite.
Comment fonctionne ce moteur à air comprimé ?
Nous comprimons de l’air que nous stockons dans un réservoir sous haute pression (de l’ordre de 300-320 bars). Ensuite, nous allons utiliser cet air en le détendant dans un dispositif de détente avec travail. Ça ressemble au fonctionnement d’un moteur classique. Par contre, ce que nous avons apporté pour avoir un bon rendement dans ce système, c’est un dispositif de chambre dite « active » qui permet de faire un transfert de charge dans une chambre et de détendre dans une autre chambre. C’est un cycle thermodynamique nouveau que nous avons créé pour pouvoir réaliser une machine de bon rendement.
Etes-vous les seuls sur le marché à proposer un tel moteur ?
Oui, nous sommes les seuls sur le marché, surtout avec cette technologie.
Aujourd’hui, on parle beaucoup du moteur à hydrogène…
Ça n’a rien à voir. Avec les moteurs à hydrogène, il y a deux possibilités : le moteur électrique accouplé à une pile à combustible et le moteur à hydrogène que l’on brûle à l’intérieur d’un moteur à combustion interne. Ce sont deux solutions. Mais, c’est complètement différent du moteur à air comprimé.
Quels sont les avantages de votre moteur par rapport au moteur à hydrogène ?
Premièrement, la difficulté du moteur à hydrogène, c’est qu’il faut fabriquer de l’hydrogène pour pouvoir l’utiliser. C’est quelque chose qui est coûteux et polluant. Deuxièmement, il faut le transporter. C’est quelque chose de difficile puisque l’hydrogène est un gaz qui est relativement instable. De plus, il peut être également dangereux de transporter de l’hydrogène. Et troisièmement, ce que nous faisons est beaucoup moins cher que les systèmes qui fonctionnent avec de l’hydrogène.
Le prix de vente prévu est très faible…
La voiture de base, la première que nous allons commercialiser, aura un prix de l’ordre de 3.500 euros. C’est une voiture très économique. C’est un peu la Méhari des temps moderne, une voiture d’utilité. Nous proposerons ensuite la « MiniCat », une voiture urbaine 3 places à 9.000 euros, et une 6 places aux alentours de 13.000-14.000 euros.
Comment expliquer ce faible prix ?
Il y a plusieurs raisons à cela. La première raison est que nous avons essayé de casser le cercle vicieux dans lequel se sont enfermés tous les constructeurs automobiles. Le prix d’une voiture, c’est son poids. Elles se vendent au poids. Plus une voiture sera légère, moins elle sera chère. Ça c’est clair puisque c’est le poids de la matière première manufacturée. Grosso modo, une voiture de classe moyenne se vend aux environs de 10-12 ?/kg. La deuxième raison, c’est notre concept industriel qui nous permet de le réaliser. Nous avons créé un concept industriel où la voiture va être réalisée chez le concessionnaire, mais réellement fabriquée. Il faut savoir que c’est un système industriel qui est particulièrement économique.
Quel est le public visé ?
A l’heure actuelle, c’est le public des personnes sensibles à l’économie, à la pollution, à l’écologie. Au départ, notre prétention n’est pas d’entrer sur le marché avec des pourcentages énormes. Tous nos plans sont fait sur quelque chose comme 1%-1,5% de pénétration sur le marché.
Quelles seront les capacités de production de vos unités ?
Chaque concessionnaire (un local de 4.300 m2 et avec 78 personnes) peut fabriquer une voiture chaque demi-heure. En France, nous prévoyons de monter 21 usines. Lorsque ces 21 unités seront équipées, nous serons donc capable de fabriquer 42 voitures/h.
Quand comptez-vous sortir votre premier modèle ?
Le premier prototype sera sur ses roues fin janvier. Nous avons prévu de faire l’industrialisation au second semestre, de faire rouler des préséries à la fin de cette année, et de commencer la commercialisation début 2009.
A part le groupe indien Tata, pourquoi les constructeurs automobiles « snobent-ils » votre invention ?
A la limite, il faut leur demander. En règle générale, les constructeurs n’aiment pas acquérir des technologies à l’extérieur de leurs sociétés. Je connais quelqu’un qui dit en plaisantant : « C’est parce que Bombay est plus prêt de Nice que Paris ». C’est un peu méchant.
Tata, c’est une autre dimension. C’est une société qui va devenir énorme. Ils ont une autre approche du problème.
Pourquoi une telle indifférence alors de la part des autres ?
Je ne sais pas réellement. Nous avons fait ce concept industriel. Nous avons un programme que nous sommes en train de mettre en place. Aujourd’hui, je n’ai pas de contacts particuliers avec les constructeurs. S’ils veulent me rencontrer, je suis prêt à les recevoir.
Avez-vous eu le soutien de partenaires publics ?
Non, pas du tout.
Comment avez-vous fonctionné avant le partenariat avec Tata ?
Plusieurs choses. Premièrement, nous sommes une société dans laquelle il y a 370 actionnaires. Ce sont des personnes qui ont amené un peu d’eau au moulin ou d’argent à la caisse. Deuxièmement, nous avons commencé à prendre des options sur les unités que nous allons construire. Cet argent nous a permis de travailler. Les temps ont été extrêmement difficiles entre 2002 et 2007. Il y avait beaucoup de dénigrement de notre process et de notre procédé. Ça a été très difficile.
Allez-vous vous développer à l’international ?
Bien sûr. Nous avons déjà des options en Australie, en Italie, en Espagne, en Israël, en Afrique du Sud, au Mexique… Nous avons 42 options qui ont été signées et nous venons de signer un précontrat et on négocie avec les Coréens du sud.
> Pour en savoir + : Société MDI
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