Par François Poizat, pour l’association Sauvons le Climat. »Si EDF ne vous le dit pas, qui vous le dira ? », entendait-on à longueur d’antennes, il y a peu. Aujourd’hui, on pourrait répondre : « Pas grand monde ! Et EDF de moins en moins ».
De fait, « Sauvons le Climat » déplore un déficit croissant d’information sur les questions énergétiques. Cela a déjà été stigmatisé par un communiqué sur l’opacité éolienne. On remarque également que, dans les polémiques actuelles (à propos du chauffage électrique ou sur « l’arnaque ou le mirage éolien », notamment), EDF est « la grande muette » qui laisse à d’autres le soin de s’exprimer (tout dernièrement le MEDAD et l’ADEME au secours de l’éolien.
S’il est un sujet où la désinformation sévit particulièrement, c’est la facture d’électricité acquittée par les consommateurs. Mais, depuis maintenant huit ans, un véritable « trou noir » existe, sur lequel rien n’est dit : la CSPE.
La CSPE, quèsaco ?
Cette « autre prestation » apparaît en principe sur les factures de tous les consommateurs d’électricité, sous le libellé suivant : « Charges de Service Public d’Electricité ». Cette appellation sibylline cache un « impôt affecté » à trois financements (du moins à l’origine) :
– la péréquation tarifaire qui garantit aux territoires français non continentaux (de la Corse à Mayotte) une compensation du surcoût de production de l’électricité dans ces îles ;
– la solidarité avec les personnes démunies pour leur permettre un accès minimal à ce besoin vital qu’est l’énergie électrique ;
– le soutien aux énergies « vertueuses » : énergies renouvelables et énergies de récupération.
Cette « pseudo-TVA » porte sur la consommation. Chaque MWh est taxé à 4,5 ?HT, également justiciable de la vraie TVA à 19,6%, soit 5,38 ?TTC. En réalité, un récent rapport d’expertise démontre :
– que cette taxe est minorée (au seul détriment d’EDF)
– et qu’elle devrait tripler ou quadrupler d’ici 2016.
Un calcul fallacieux
La loi du 10 février 2000 « relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité », qui supprima le monopole d’EDF et des quelque 160 Distributeurs Non Nationalisés en 1946, confia à ceux-ci les trois missions sus-définies (citoyenne, républicaine et écologique) tout en leur garantissant une « compensation intégrale ». Grosso modo, les deux premières donnent effectivement lieu à compensation. Là où le bât blesse, c’est sur la compensation du surcoût résultant de l’obligation d’achat de l’énergie produite par des installations de cogénération, des fermes éoliennes, des centrales hydrauliques (de petite taille), des panneaux photovoltaïques, etc.
En effet, depuis le 31 décembre 2004, ce surcoût est évalué en faisant la différence entre le coût d’achat de l’électricité éolienne (84 ?/MWh), cogénérée (~100 ?/MWh), photovoltaïque (300, voire 550 ?/MWh) et un « prix de marché moyen pondéré » calculé par la Commission de Régulation de l’Energie (63,6 ?/MWh en 2007).
Ce faisant, la Commission de Régulation de l’Energie considère que si EDF n’achetait pas ces énergies, elle serait obligée de faire son marché, comme POWEO ou Direct Energie, sans pouvoir puiser dans son parc (exportateur net pour 15 % par an) au coût de revient bien plus faible, voisin de 25 ?/MWh. Le déficit de compensation pour EDF est donc proche de 40 ?/MWh.
Ainsi, en 2007, l’obligation d’achat de 28 TWh dits « vertueux » (dont ~15 TWh de cogénération et un peu plus de 4 TWh d’éolien) a coûté à EDF de l’ordre de 2,3 milliards d’? mais, déduction faite des « coûts évités » estimés à environ 1,3 milliard d’? sur la base dudit prix de marché, il ne lui sera remboursé qu’un milliard au titre du volet « vertueux » de la CSPE ! Pour autant, la partie immergée de l’iceberg de la CSPE restera à charge d’EDF, c’est-à-dire de ses clients et de ses actionnaires.
Et la douloureuse ne peut que croître, proportionnellement à l’essor « vertueux »
Conformément au déploiement massif, arrêté en juillet 2006, de nouvelles installations renouvelables devant être mises en service d’ici fin 2015 (à hauteur de 22 250 MW – dont 17 000 MW d’éolien – produisant 68 TWh), l’obligation d’achat portera sur 96 TWh dès 2016. Il en résultera fatalement une facture en hausse substantielle sous forme d’une hausse de la CSPE, d’une part, et, si le mode de calcul de la CRE perdure, d’une hausse des prix de l’électricité pour les seuls clients d’EDF, d’autre part.
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