La société Thor Energy, créée en 2006 par le fondateur de Renewable Energy Corporation (REC) M. Alf Bjørseth, propose un projet de construction d’ici à 2020 de deux centrales nucléaires de deux réacteurs chacunes à base non pas d’uranium mais de thorium.
Elle doit se prononcer dans quelques jours quant au choix de ses collaborateurs pour la construction des réacteurs : trois sociétés sont en concurrence dont la société canadienne AECL Technologies déjà impliquée dans la construction de 36 centrales atomiques. D’après le quotidien Dagens Naerinsliv, ces deux centrales pourraient être implantées dans la région de Porsgrunn. Elles équivaudraient à 20% de la production nationale énergétique actuelle ce qui veut dire qu’on pourrait augmenter l’exportation d’énergie hydraulique (sans CO2). « Cela peut paraître ambitieux, déclare le Directeur de Thor Energy M. Anders Hermansson, mais il faudra 60-70 ans avant que l’énergie renouvelable comme les éoliennes et les panneaux solaires ne remplacent les sources énergétiques actuelles et les centrales nucléaires peuvent être en place dans 10-12 ans« .
Un comité d’experts, nommé par le gouvernement et présidé par le Professeur Mikko Kara (Directeur de VAPO et ancien Vice-Président du centre de recherche VTT en Finlande), a présenté ses conclusions sur l’exploitation des réserves nationales de thorium le 15 février 2008 (après 1 an de travail et 1 million NOK soit 8 millions d’euros d’investissement). Le comité ne rend pas de conclusion définitive sur l’opportunité d’une filière d’exploitation du thorium en Norvège en expliquant que, bien que les ressources potentielles de thorium dans ce pays soient importantes (évaluées à 170.000 tonnes, ce qui le place parmi les principales réserves dans le monde), les connaissances actuelles ne sont pas suffisantes pour pouvoir conclure sur l’intérêt économique de son exploitation. Il considère néanmoins que cette option est une alternative à considérer pour la production d’énergie « durable » sur le long terme. De son côté, Thor Energy, qui a investit 20 millions NOK (160 millions d’euros), a annoncé la parution prochaine de son propre rapport issu des meilleurs experts mondiaux sur la faisabilité de ce projet.
Il est à noter qu’une étude récente du NGU (Service Géologique Norvégien) indique que l’extraction du thorium à partir du gisement « Fen Complex« , l’un des principaux gisements renfermant du thorium en Norvège, serait très délicate et onéreuse et qu’il serait peut-être plus rentable d’importer du thorium, d’ailleurs largement disponible sur le plan mondial.
Outre la faisabilité technique d’un tel projet qui demande beaucoup de recherche/développement et de collaborations au niveau international, les principales questions sont d’ordre financier mais aussi d’ordre sociétal afin de convaincre une opinion publique norvégienne largement opposée au nucléaire. « Il est évident que le plus grand défi est de convaincre les politiques » affirme M. Hermansson. « La Fédération des Industries Norvégiennes (Norsk Industri) est depuis longtemps favorable à l’idée de centrales nucléaires en Norvège et on espère que de grandes sociétés industrielles et énergétiques norvégiennes vont participer au capital« . Jusqu’à présent, seule la société Statkraft a clairement montré son intérêt pour le projet thorium. M. Jon Petter Omtvedt, professeur à l’Université d’Oslo, et M. Kjell Bendiksen de l’IFE (Institutt For Energiteknikk) estiment que des centrales nucléaires basée sur le thorium sont une solution pour réduire les émissions de CO2 dans les décennies à venir.
Au parlement, seul le Parti du Progrès soutient ce projet. Le mouvement environnemental, contre la construction d’une centrale au thorium en Norvège, pourrait changer de cap selon M. Bård Bergfald, ancien membre de la Fondation Bellona qui continue d’être fortement opposé aux centrales nucléaires à l’uranium mais juge que les centrales au thorium sont une toute autre chose. M. Niels Bøhmer, membre actuel de la Fondation, pense au contraire qu’aucun revirement n’aura lieu : « Il y aura aussi des questions de déchets avec le thorium même si ses partisans disent le contraire. On pense également qu’il y a un risque d’accident et de dissémination d’armes nucléaires car il introduit de l’uranium 233 qui peut être utilisé comme arme« .
BE Norvège numéro 77 (7/03/2008) – Ambassade de France en Norvège / ADIT
http://www.bulletins-electroniques.com/actualites/53420.htm
Commentaires récents