Guillaume POIZAT, ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure et agrégé en Génie civil, co-fondateur de l’entreprise EO2, spécialiste de la valorisation énergétique de la biomasse en France, cotée à la Bourse sur le marché libre.
Quelle est l’activité d’EO2 ?
EO2 est une SA cotée sur le marché libre. Notre c?ur d’activité est essentiellement le milieu du bois et plus généralement la biomasse. Cependant, il s’agit de biomasse non liquide. Nous avons décidé depuis longtemps de ne pas nous engager dans la voie de l’éthanol, du bioester et plus généralement de tout ce qui est issu du monde agricole et culture dédiée, pour produire du biocarburant sur des sols où l’on pourrait faire pousser autre chose.
Nous avions senti le vent de la polémique actuelle venir il y a quelques années. Nous travaillons donc essentiellement sur les déchets de l’industrie du bois et sur l’utilisation des déchets de l’agriculture. Sur les différentes façons de commercialiser le bois, le granulé possède la plus grande efficacité environnementale et économique sur la petite et la moyenne thermie.
Et le granulé, concrètement?
C’est de la sciure dont on a enlevé l’eau et que l’on a compacté. Le granulé dispose donc de caractéristiques en terme de logistique très intéressantes et très performantes, et en terme de combustion, il permet des rendements très élevés. On se retrouve alors avec un combustible qui du point de vue de l’usage se rapproche plus du fuel que de tout autre forme de biomasse.
Etes-vous les seuls à proposer ce produit ?
C’est un produit qui existe depuis 30 ans dans les pays scandinaves, depuis 10 dans toute l’Europe et cela démarre en France depuis 2 ans.
Comment expliquez-vous un tel retard ?
Tout simplement parce que la France globalement une bonne dizaine d’années de retard sur tout ce qui touche le domaine environnemental. Ce retard est valable pour le granulé bois et l’utilisation de la biomasse plus généralement. Sur des installations d’une certaine taille, on peut utiliser une autre forme que le granulé bois. L’intérêt du bois est qu’il dispose de très bonnes caractéristiques dans la combustion. Il possède un très faible taux de cendres, il n’y a pas de mâchefers, pas d’acidité dans les fumées. Avec le granulé il n’y a pratiquement pas de poussières ou de particules, c’est vraiment très efficace.
D’un point de vue écologique, c’est un produit qui semble effectivement très intéressant?
Tout à fait mais ce n’est pas révolutionnaire puisque cela fait trente ans que ça existe ailleurs ! On commence à en attendre parler mais on est encore au début. Néanmoins, le prix du carburant fait bouger les choses.
Le granulé est vraiment un substitut du fuel de chauffage ou plus généralement du fuel de thermie. Sachant que le prix du fuel à la livraison a quasiment doublé pour les particuliers, ainsi que pour les industriels, les collectivités ou les chauffages urbains, le granulé se situe désormais à près de 50% du prix du fuel. Il commence effectivement à intéresser.
Le granulé nécessite certainement un équipement particulier ?
Le réseau est le même mais le corps de chauffe ou le bruleur doit être modifié.
Le surcout à l’installation est-il compensé par les économies futures ?
C’est toute la question. Cela va dépendre de la taille de la chaudière. Plus la chaudière est grosse, plus allez économiser vite. Sur une chaudière de moyenne taille, en à peu près deux à trois ans, vous entrez dans vos frais et par la suite, vous payez moitié moins cher.
Existe-t-il des aides à l’installation ?
Il existe aujourd’hui des aides sur la petite thermie, comme l’éolien pour le particulier il devrait avoir le plan ou fond chaleur sur les moyennes thermies. Mais cela entre dans le cadre du Grenelle et cela n’est pas encore acté.
Le coût reste deux fois à deux fois et demi plus cher qu’une chaudière « classique » mais il existe un crédit d’impôt de 50% dessus. Au final cela revient donc à 25% plus cher équivalent.
C’est tout de même un marché à fort potentiel ?
Si l’on regarde l’Allemagne, l’Autriche ou l’Italie, en 5-6 ans, ils ont multiplié par dix les installations et la consommation. La France devrait en toute logique suivre la même tendance mais encore une fois avec dix ans de retard.
Et l’ambition d’EO2 sur ce nouveau marché ?
La contradiction française est que le pays dispose d’une des plus grandes forêts d’Europe mais aussi de celle que l’on utilise le moins en énergie. La filière bois est le deuxième déficit commercial français après le pétrole, alors qu’elle abrite la deuxième ou troisième forêt européenne. L’utilisation de la ressource bois en France est actuellement une aberration. EO2 est donc un acteur qui cherche à valoriser un peu plus cette filière.
D’un point de vue logistique, comment fonctionnez-vous ?
Nous sortons des camions de 25 tonnes de l’usine. Soit ces camions livrent directement autour de l’usine, soit nous disposons d’un relai distributeur qui assurera la livraison pour tous les autres. Ceci pour limiter les pertes sur le plan du bilan énergétique global.
Et s’agissant des chaudières ou bruleurs spécifiques à cette technique, l’offre suit-elle ?
Elle commence à s’installer. Il y a encore deux ans, c’était encore compliqué mais aujourd’hui on trouve plus facilement des référencements. Après deux hivers plutôt compliqués, la croissance des installateurs de chaudière est néanmoins très impressionnante.
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