Joël Picard, président d’Aurea, groupe français en forte croissance, leader européen du recyclage des huiles, des pneus, du pvc rigide. Il vient de publier un chiffre d’affaires 2008 consolidé au 30 septembre de 58 millions d’euros en hausse de 37%.
Pouvez-vous nous présenter votre groupe ?
C’est un groupe qui fait du recyclage et de la régénération. Nous avons cinq métiers principaux : le recyclage des huiles usagées, des pneus usagés, du PVC, des plastiques complexes, ainsi que la régénération des eaux polluées par les hydrocarbures.
En revanche, nous ne collectons pas. Nous achetons les déchets, nous les nettoyons, nous les trions, et nous les recyclons pour en faire une nouvelle matière première que nous revendons aux personnes qui l’ont mis en premier sur le marché. Nous ne faisons donc concurrence ni à nos clients ni à nos fournisseurs. Nous sommes des industriels purs.
Vous venez de publier vos résultats trimestriels, comme les analysez-vous ?
Nous sommes prudents dans l’analyse de ces résultats étant donné que nous sommes dépendants du marché pétrolier pour certains produits. Donc bien évidemment lorsque le pétrole est cher, le chiffre d’affaires a tendance à augmenter, et inversement lorsque les prix sont faibles. C’est un impact qui peut jouer sur un trimestre mais globalement, nous n’attendons pas de baisse de notre activité.
Pour 2009, nous sommes plutôt optimistes étant donné que nous marchons bien et que nous n’avons aucun problème d’endettement. Maintenant, nous restons tributaires de l’économie générale. En terme de croissance interne, généralement de l’ordre de 14%, nous ne devrions pas connaître de soucis et la croissance externe devrait nous offrir des opportunités intéressantes.
Comment vous positionnez-vous par rapport aux « grands » du secteur comme Suez ou Veolia ?
Nous ne faisons pas du tout le même métier. Suez et Veolia prennent des produits, les mettent en décharge ou les envoient en Chine. Nous sommes des industriels, nous transformons des produits et nous n’exportons rien. Nous consommons sur place les produits que nous avons nettoyé et recyclé et nous ne détruisons pas plus de 4 à 5% de la matière première traitée.
Quand vous brûlez des produits dans des centres d’incinération, vous détruisez le produit. Hormis Sita qui dispose de quelques unités, ces grands du déchet ne viennent pas sur le secteur industriel. Ce sont d’excellents collecteurs, de très bons destructeurs de produits, mais ils n’en font rien.
Quelles sont vos perspectives de croissance pour 2009 ?
Actuellement, des PME commencent à être un peu à sec de cash, et se dirigent vers nous. Il est donc vraisemblable que l’on réalisera plusieurs opérations (NDLR : de croissance externe) dans le courant de l’année prochaine.
Vous regardez uniquement la France ou vous scrutez l’étranger ?
Nous sommes avant tout européens. Nous sommes présents en Belgique, en Allemagne, et nous serons vraisemblablement présents en Espagne d’ici la fin de cette année si tout se passe bien. C’est donc vraiment l’Europe qui nous intéresse. Nous y réalisons le tiers de notre chiffre d’affaires.
Il faut savoir que la France est le marché le plus difficile en Europe en raison des problèmes liés à l’environnement, des problèmes administratifs, et de non application ou de retard dans l’application des règlements européens. Il faut donc mieux se développer ailleurs où il existe un état d’esprit favorable à l’environnement ce qui n’est à mon sens pas le cas en France.
Qu’est-ce qui fait votre force ?
Nous concentrer uniquement sur le recyclage et d’être des industriels.
Vous envisagez de vous tourner vers le recyclage de piles batteries, où en êtes-vous ?
C’est un métier compliqué et relativement dangereux en raison par exemple de la présence de parties explosives. De plus il est difficile de connaître à l’heure actuelle l’efficacité des réseaux de collecte. Donc tant que nous n’avons pas réglé les problèmes environnementaux et le problème des réseaux de collecte, il nous est difficile de rentrer dans ce métier, nous n’aimons pas prendre des risques avec la législation ou avec l’environnement.
Le jour où nous aurons identifié le bon process, qui ne pose aucun problème d’un point de vue environnemental, nous sauterons le pas. Cela peut-être d’ici un à deux ans, mais cela fait déjà deux ans que l’on travaille dessus.
En tant qu’acteur, quel regard portez-vous sur le Grenelle de l’environnement ?
Une bonne volonté générale s’est manifestée, et des choses intéressantes ont été dites mais compte tenu des circonstances économiques, pas grand chose ne se fait. Si le Grenelle permettait seulement l’application des règlements européens, cela serait déjà un grand pas mais cela n’est même pas le cas.
Nous attendons en revanche une taxe ou deux ! (sic) Le vrai problème est de savoir si nous sommes prêts en France, à ouvrir le marché de l’environnement à d’autres acteurs que les grandes sociétés actuellement en place.
Avez-vous vocation à être racheté un jour ou l’autre par un de ces grands justement ?
Je ne sais pas de quoi est fait l’avenir. Ma société est cotée en Bourse. Je ne suis donc pas seul dans cette affaire. Bien qu’étant un actionnaire important avec 49% environ, j’ai une responsabilité vis à vis de mes actionnaires. Si un jour on me fait une proposition, je l’étudierai.
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