Par Michèle Sabban, présidente de l’Assemblée des Régions d’Europe. L’ARE publie une enquête qui couvre 66 régions réparties dans 24 pays de la grande Europe, et qui milite pour un élargissement du champ de compétences des régions, accompagné d’incitations financières adaptées, qui leur permettrait de répondre aux défis énergétiques globaux en tirant le meilleur parti de leurs potentiels énergétiques locaux.
Les régions sont indéniablement les mieux placées pour valoriser les potentiels énergétiques locaux et mettre au point des solutions innovantes visant à répondre aux besoins de l’Europe en énergie tout en respectant l’environnement. Telles sont les premières conclusions d’une grande enquête menée auprès des régions d’Europe et révélées hier lors de l’Assemblée Générale de l’ARE (Assemblée des Régions d’Europe) à Belfort (Franche-Comté). Cette organisation constitue le plus vaste réseau des régions d’Europe.
Les premières conclusions de l’enquête confirment ce que l’ARE ne cesse d’affirmer depuis des années. Si on leur donne les compétences et les fonds nécessaires, les régions n’hésitent pas à relever les défis les plus exigeants auxquels l’Europe est confrontée. Lorsqu’il s’agit de tirer parti des ressources énergétiques locales, d’imaginer et expérimenter des solutions locales innovantes pour répondre aux besoins en énergie et de résoudre les problèmes environnementaux, la démarche la plus efficace consiste à ?penser global, agir local’. C’est l’essence même du principe de subsidiarité et c’est également ainsi que la politique européenne en matière d’énergie devrait fonctionner.
L’enquête de l’ARE menée auprès des régions a permis de constater que 91 % d’entre elles considèrent l’énergie comme l’une de leurs priorités-clés pour les 15 années à venir et que 75 % d’entre elles ont d’ores-et-déjà mis en place une stratégie énergétique. Ces stratégies comportent la plupart du temps un plan spécifique de développement des énergies renouvelables (ENR).
Les régions de France et de Hongrie regrettent cependant que l’exploitation des ENR soit entravée par le manque de compétences dans ce domaine. Ce constat revient souvent dans les conclusions de l’enquête : pour pouvoir relever concrètement les défis énergétiques auxquels l’Europe est confrontée, les régions doivent être dotées des moyens nécessaires, plutôt que freinées dans leur élan.
Les approches diversifiées et innovantes mises en place par les régions pour valoriser leurs potentiels énergétiques locaux illustrent parfaitement cette nécessité : en effet, celles qui sont dotées des attributions et du financement appropriés ont su tirer le meilleur parti de leurs atouts territoriaux. A titre d’exemple, l’enquête met en avant l’exploitation ou la valorisation des ressources suivantes : les déchets solides : Bruxelles (Belgique) et Gelderland (Pays-Bas) ; la force des vagues : Açores (Portugal) ; la neige : Västernorrland (Suède) ; la paille : Bornholm (Danemark) ; la « liqueur noire » (issue du processus de fabrication de la pâte à papier) en Finlande centrale ; l’énergie solaire dans les régions d’Autriche et d’Europe du Sud ; le bois-énergie : Ticino (Suisse) et dans les Balkans.
Plusieurs régions produisent de l’énergie à partir d’ENR dans des proportions supérieures à l’objectif de 20 % fixé par l’UE, tandis que ces mêmes sources d’énergie ont permis à certaines régions d’atteindre l’autonomie totale en matière de consommation électrique. Par exemple, de 88 à 100 % des besoins en électricité sont couverts par l’énergie hydraulique dans les régions de Maramures (Roumanie), Norrbotten (Suède), Oppland (Norvège) et Trento (Italie).
Les initiatives en matière d’énergies renouvelables ne peuvent se faire qu’avec un soutien politique et des mesures d’incitations financières de la part des décideurs nationaux et européens. Par exemple, l’Union Européenne pourrait faire plus en matière de promotion des énergies renouvelables à base de bois. Nous avons tant de régions forestières, et pourtant le bois-énergie ne représente que 3 % de la production totale de l’UE. Les régions les moins développées, en particulier, ont besoin de soutiens financiers pour exploiter ces ressources.
A ce sujet, les réponses à l’enquête de l’ARE montrent que le manque de visibilité des instruments financiers prévus par l’UE bride les politiques et l’exploitation efficace du potentiel des régions en matière énergétique. Alors que 24 % des régions interrogées ont désormais recours aux programmes européens de coopération territoriale financés par le FEDER (Fonds européen de développement régional), très rares sont celles qui utilisent les prêts de la Banque Européenne d’Investissement ou le soutien de l’UE aux programmes d’éducation pour la jeunesse faisant la promotion des énergies renouvelables. Ceci souligne la nécessité grandissante de simplifier les procédures de l’UE, une cause pour laquelle l’ARE s’engage pleinement.
S’agissant de l’utilisation intelligente de l’énergie, l’enquête a révélé que 40 % des régions utilisent d’ores et déjà des technologies de réseaux intelligents (dites « smart grid »). Si ce chiffre est encourageant, il montre également que des mesures d’incitation supplémentaires sont nécessaires afin d’aider les régions à améliorer leur efficacité énergétique dans le but de s’aligner sur les objectifs 20/20/20 de l’UE.
98 % des régions interrogées sont convaincues de pouvoir jouer un rôle positif dans la lutte contre le changement climatique. Mais les gouvernements nationaux et l’UE doivent leur fournir les armes nécessaires pour qu’elles puissent partir au combat.
> Pour en savoir + : Consulter les premières conclusions de l’enquête de l’ARE
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