Par l‘Institut National de la Consommation, qui revient sur la réforme de la taxe carbone, retoquée récemment par le Conseil constitutionnel.
Le gouvernement planche sur une nouvelle version de cet outil de lutte contre le réchauffement climatique, après la censure du Conseil constitutionnel fin décembre. Du côté des associations de consommateurs, la CLCV et la Fnaut demandent une révision des modalités de sa mise en ?uvre, tandis que l’UFC-Que choisir ne serait pas fâchée si la taxe était mise au placard.
Entre les deux fêtes de fin d’année, le Conseil constitutionnel a retoqué la taxe carbone par une décision qui fera date ? car elle pousse le gouvernement et le Parlement à des choix plus justes en matière de fiscalité écologique (décision n° 2009-599 DC du 29 décembre 2009).
Rupture caractérisée de l’égalité
Les gardiens de la Constitution ont estimé que le dispositif devant entrer en vigueur ce 1er janvier contenait trop d’exemptions en faveur des industries et services les plus polluants (centrales thermiques produisant de l’électricité, raffineries, cimenteries, cokeries, transports aériens et routiers, etc.), ce qui aurait créé « une rupture caractérisée de l’égalité » devant l’impôt. Selon le Conseil, « moins de la moitié des émissions de gaz à effet de serre aurait été soumise à la contribution carbone » et « 93 % des émissions d’origine industrielle hors carburant » n’auraient pas été taxées !
Conçu comme un outil de lutte contre le réchauffement climatique, ce prélèvement fiscal était un des dispositifs centraux de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010. Le gouvernement a repris le dossier en main : il annonce qu’un nouveau texte sera présenté en conseil des ministres le 20 janvier pour une application le 1er juillet. Une taxe devrait donc tout de même voir le jour, dont le but reste de « réorienter les comportements des entreprises et des ménages en matière de consommation d’énergie ».
Pour une meilleure prise en compte des « précaires énergétiques »
Dans sa version initiale, la taxe carbone devait augmenter les prix des carburants et du fioul domestique de plus de 4 centimes par litre et ceux du gaz naturel de 0,3 centime par kilowattheure, mais une compensation sous forme de crédit d’impôt était prévue pour les ménages : 46 euros ou 61 euros pour un adulte selon son lieu de résidence, et 10 euros de plus par personne à charge (voir INC Hebdo n° 1531).
Pour les associations de consommateurs et de protection de l’environnement, la décision du Conseil constitutionnel rouvre le débat sur le niveau et les modalités de la future taxe. La Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut) souhaite que la tonne de carbone soit réévaluée à 32 euros, contre 17 euros dans la version votée en fin d’année par le Parlement, ce qui augmenterait les charges payées par les familles. Et pour elle, la redistribution doit se limiter « aux seuls ménages fragiles économiquement » ? autrement dit, aux « précaires énergétiques », ces ménages modestes fortement dépendants de la voiture et de modes de chauffage très émetteurs de CO2 (fioul, gaz, charbon, etc.). Pour la Fnaut, la majeure partie des recettes de la taxe doit servir à financer notamment « le renforcement des transports collectifs dans les zones périurbaines et rurales et l’offre de logement dans les zones urbanisées ».
Consommateurs captifs
L’association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV) demande au gouvernement de « revoir en profondeur sa copie et d’accompagner les particuliers [?] en leur fournissant les moyens de s’équiper de dispositifs économes en énergie ». Elle plaide ainsi pour des aides au bénéfice des ménages « contraints dans leur mode de consommation ». Elle réclame aussi « une refonte plus large de la fiscalité » et une révision des systèmes d’exemption pour « plus d’équité entre professionnels et consommateurs ».
L’Union fédérale des consommateurs (UFC-Que choisir) relance même le débat sur le bien-fondé de ce prélèvement : « Nous nous sommes toujours montrés sceptiques quant à l’efficacité de cette taxe [?] car beaucoup de consommateurs sont captifs » de moyens de transport ou de chauffage polluants. L’UFC-Que choisir préférerait que le gouvernement « repense sa fiscalité écologique dans son ensemble » et étende à de nouveaux produits le système des bonus-malus appliqué aujourd’hui à l’achat de voitures neuves.
Toutes les associations risquent d’être déçues. Le 5 janvier, la ministre de l’économie et de l’industrie indiquait dans le quotidien Les Échos que « le principe même de la taxe, son niveau et la redistribution pour les ménages » n’étaient pas remis en cause. « Nous n’avons donc pas l’intention de modifier le volet ménages de la contribution carbone, poursuivait Christine Lagarde. Même chose pour les professionnels les plus exposés, tels que les routiers, les agriculteurs ou les pêcheurs : les tarifs réduits qui étaient prévus ne sont pas contestés et peuvent donc être conservés. »
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