La pêche illégale est une réalité difficile à évaluer qui se traduit aussi concrètement par une confusion parfois organisée sur les étals sur les espèces des poissons vendus. Pourtant, les solutions techniques existent pour lutter contre les fraudes.
Un pourcentage inconnu de poissons que nous mangeons ne sont pas ce qu’ils sont censés être s’inquiète la FAO, l’organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. Pourtant, des techniques d’investigation médico-légales peuvent aider à résoudre ce problème.
« L’identification des poissons non transformés est en général assez facile, explique Michèle Kuruc du département Pêche et aquaculture de la FAO. Mais aujourd’hui, les produits halieutiques sont exportés loin, vers des lieux où ils ne sont pas forcément bien connus. De plus, l’industrie s’est mondialisée et les produits halieutiques sont souvent transformés dans des bateaux-usines avant même d’être débarqués. La plupart du temps, ce que voient les inspecteurs ne ressemble plus du tout à un poisson à l’état sauvage ».
Parfois, l’identification précise des poissons dépasse les capacités des inspecteurs. « D’innocentes erreurs d’écriture peuvent finir par transformer un type de poisson en un autre », souligne la FAO. De plus, des pêcheurs et des commerçants sans scrupules se jouent du système pour éviter restrictions ou taxes.
Nombreuses méthodes de fraudes
Selon Michèle Kuruc, les personnes impliquées dans la pêche illicite, non réglementée et non déclarée (IUU) utilisent de nombreuses méthodes pour dissimuler leurs activités illégales et mettre sur le marché leurs produits mal acquis. « La substitution frauduleuse de produits et l’utilisation de fausses dénominations et de documents frauduleux sont fréquemment utilisées pour transporter et commercialiser des produits illicites », affirme-t-elle.
Au final, sans connaître véritablement son importance, de nombreux produits halieutiques qui se retrouvent sur les étals ne correspondent tout simplement pas aux étiquettes sous lesquelles ils sont vendus. Si les consommateurs sont conscients aujourd’hui des multiples bienfaits pour la santé de consommer des produits halieutiques, ils veulent être sûrs de manger du poisson qui a été pêché ou élevé de façon responsable et de consommer un produit sain et sûr.
La FAO rappelle qu’un certain nombre d’importants détaillants de l’agro-alimentaire se sont engagés ces dernières années, à commercialiser seulement des produits halieutiques certifiés durables. À partir du 1er janvier 2010, le plus grand marché mondial de produits halieutiques, l’Union européenne, a mis en place une règlementation afin de bloquer les importations de poissons pêchés de manière illicite.
86 milliards de dollars par an
Avec 110 millions de tonnes de produits halieutiques consommés annuellement, le commerce international des produits de la pêche est évalué à un niveau record de 86 milliards de dollars par an. Cela représente une source importante d’emplois et de recettes publiques pour les pays en développement dont les zones de pêche alimentent les pays développés.
En réponse aux inquiétudes concernant l’état de nombreux stocks halieutiques, une surveillance constante sur les quantités de poissons capturés et les lieux de pêche est nécessaire. Des technologies légales basées sur la génétique et la chimie sont déjà utilisées par certains pays pour surveiller et contrôler le commerce de produits, d’animaux et du bois.
Ainsi, la FAO a récemment organisé un atelier d’experts, inspecteurs, agents des services de répression (chargés de faire appliquer la loi), scientifiques et universitaires pour discuter de la façon dont ces technologies pourraient être plus largement déployées dans le contrôle des pêches. « Nous souhaitons promouvoir une utilisation plus large des techniques médico-légales disponibles, en particulier dans les pays en développement, indique Michèle Kuruc. Quelques pays ont avec succès utilisé diverses méthodes médico-légales dans des enquêtes et lors de poursuites judiciaires, mais une large part du personnel chargé de la surveillance et du contrôle des pêches ignore encore leur existence ».
Analyse ADN
L’analyse de l’ADN peut révéler l’espèce d’un filet blanc suspect. Des tests chimiques sur des ouïes de poissons indiquent les aliments absorbés et permettent de localiser la région précise où ils ont été capturés.
« Les poissons peuvent être correctement identifiés si les échantillons sont manipulés correctement, arrivent dans les bons laboratoires et sont vérifiés selon des techniques médico-légales, a précisé Michèle Kuruc. Il faudrait donc aider les pays qui ne disposent pas de tels équipements à y accéder afin qu’ils puissent identifier et poursuivre les cas de malversation ».
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