L’aquaculture représente une alternative intéressante à la pêche intensive et au problème des quotas. Convaincue globalement des vertus de cette démarche , l’Union européenne devrait prochainement définir une politique plus ambitieuse dans ce domaine en insistant notamment sur un soutien politique plus marqué, des règles plus claires et plus de transparence dans l’étiquetage.
Pour le Parlement européen « l’aquaculture peut contribuer à satisfaire la demande croissante de poisson sans porter atteinte à l’environnement » Mais pour réussir, l’aquaculture doit « garantir la qualité et recevoir un soutien politique », c’est à cette conclusion que sont arrivés les parlementaires lors d’une audition publique qui ?est tenue mardi dernier. A cette occasion, les représentants des pisciculteurs ont insisté sur la nécessité d’une « volonté politique », de « règles claires et équitables » et d’un « système d’étiquetage fiable ».
L’Europe consomme chaque année plus de 5 millions de tonnes de produits de l’aquaculture, alors que sa production n’atteint même pas 1 million de tonnes, indique le député italien Guido Milana, rapporteur pour le rapport intitulé « Construire un avenir durable pour l’aquaculture ». Pour le parlementaire, même si l’Europe doit faire face à une rude concurrence internationale, elle peut gagner la confiance des consommateurs en assurant une production de qualité.
L’audition sur les moyens dont dispose l’Europe pour promouvoir son aquaculture contribuera à l’élaboration du rapport d’initiative de Guido Milana, qui devrait permettre de déterminer le type de législation le mieux approprié à ce secteur. D’ores et déjà, l’accent devrait être mis sur un soutien politique plus marqué, des nouvelles règles claires et équitables, un étiquetage plus transparent.et une sensibilisation des consommateurs à ces produits.
Une aquaculture « verte » possible
Le Parlement européen souligne que l’aquaculture souffre d’une mauvaise image, souvent justifiée, mais également d’une méconnaissance de ce secteur économique relativement nouveau. L’un des principaux sujets de préoccupation est sa durabilité environnementale. Fernando Otero Lourido, directeur de l’association des producteurs de turbot de Galice, indique que la pisciculture peut être une activité intégralement durable. C’est le cas de la Galice qui accueille un des sites aquacoles les plus importants au monde, à côté de la réserve marine de Lira.
« Il existe apparemment une multitude de marquages sur les étiquettes », a fait observer Marco Greco de l’association italienne d’agriculture biologique. En pisciculture comme en agriculture, il convient de distinguer la production « durable » et « éco-compatible » de la production « biologique ».
À propos d’une observation de Guido Milana sur les importations en Europe de pangasius d’origine asiatique que les consommateurs ne connaissent que sous la forme de filets et dont ils ne connaissent nullement l’origine, le britannique Struan Stevenson regrette que l’Organisation mondiale du commerce n’accorde aucune importance au bien-être animal. « La seule façon de traiter la question est de sensibiliser les consommateurs » indique-t-il.
Plus de poissons « herbivores »
Les députés se sont également interrogés quant à savoir si on pouvait parler d’aquaculture durable vu les quantités de poissons capturés pour alimenter les poissons d’élevage. En réponse à la députée verte Isabella Lövin sur la possibilité de proposer à la consommation davantage de poissons « herbivores », tels que la carpe ou le tilapia, Dawn Purchase indique que les détaillants ont de la peine à convaincre les consommateurs de consommer ces poissons, du moins au Royaume-Uni. Cependant, leur préparation par des chefs de la haute gastronomie pourrait stimuler la demande, ajoute-t-il.
La Norvège exporte 97% de sa production aquacole, contrairement à l’UE dont les importations sont nettement supérieures aux exportations dans ce secteur. L’aquaculture norvégienne bénéficie également d’un large soutien politique et d’une excellente situation géographique, indique le norvégien Petter Arnesen.
La Norvège applique des règles strictes afin d’assurer la durabilité de l’aquaculture et ne ménage aucun effort dans la lutte contre les infections, les parasites des poissons; elle échappe par conséquent à la contamination des poissons sauvages par les saumons d’élevage. Aujourd’hui, le recours aux antibiotiques est quasi inexistant, sauf pour la lutte antiparasitaire, déclare-t-il.
Empreinte carbone
Isabella Lövin demande si l’aquaculture peut être associée à la durabilité si des poissons de haute qualité, tels que le maquereau ou des espèces surpêchées, comme le merlan bleu, sont transformés en farine de poisson destinée aux saumons. Le maquereau d’Islande est devenu un aliment de pisciculture, toutefois il s’est avéré inapproprié pour le saumon et a échoué dans les aliments pour volailles, répond Petter Arnesen, qui ajoute que « l’objectif n’est pas d’être associé au pillage des mers ».
Le député français Alain Cadec pose la question de l’empreinte carbone des élevages de saumon et de la durabilité des exportations de saumons norvégiens vers la Chine, qui sont ensuite réimportés en Europe, comme produit transformé. Petter Arnesen répond que l’impact CO2 de cette opération n’est pas très important si l’on sait que les poissons sont congelés et transportés en grandes quantités.
Guido Milana suggère l’élaboration d’un « règlement parapluie » qui apporterait clarté et cohérence, ainsi que la mise en place d’un fonds unique et spécifique de soutien à l’aquaculture. Toutefois, « nous ne sommes pas encore sur le point de pouvoir élaborer un règlement », indique-t-il. Le rapport Milana devrait être voté en commission de la pêche les 3 et 4 avril, et en plénière au mois de juin.
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