Par l’association GERES (Groupe Energies Renouvelables, Environnement et Solidarités) à travers l’opération CO2Solidaire, premier programme historique français de compensation carbone volontaire. Créée en 1976, l’ONG GERES agit dans les pays en développement afin de réduire la pauvreté des populations locales tout en limitant leur vulnérabilité face aux changements climatiques.
Le développement croissant du secteur de la compensation carbone se traduit en France par l’arrivée massive de nouveaux acteurs économiques agissant dans une logique commerciale. Développées à grands renforts d’arguments marketing par les opérateurs pour attirer de nouveaux clients, les offres se multiplient.
Nouveau graal des temps modernes, l’objectif de « neutralité carbone » est souvent annoncé comme la solution dans la lutte contre les changements climatiques. Du Vatican au chocolat, en passant par le grand prix de F1 de Montréal, beaucoup revendiquent d’ores et déjà haut et fort une neutralité climatique de façade.
Souvent intégrée à une politique globale de « performance environnementale » (sic), cette pratique relève d’avantage d’une communication abusive que d’une action authentique de réduction à la source des émissions de gaz à effet de serre. Réduction qui est pourtant l’enjeu essentiel pour les pays du Nord.
Dans le récent ouvrage « La compensation carbone : illusion ou solution ? », Augustin Fragnière, enseignant-chercheur à l’Université de Lausanne, souligne entre autres choses l’inconsistance de la neutralité carbone comme solution affichée pour lutter contre les changements climatiques. Les principales critiques portent sur le fait que :
– La neutralité carbone traduit une sorte d’impunité climatique, or celle-ci ne saurait exister sur une planète où nous, au Nord, sommes les premiers responsables de la situation actuelle. Elle constitue un privilège pour les pays industrialisés en laissant entendre sans équivoque que tout impact sur le climat peut être annulé par cette voie.
– La neutralité carbone se confine à une stratégie d’affichage qui supplante, lorsqu’elles existent, les actions de réduction à la source des émissions de CO2. Dans ce registre, il est donc possible de s’afficher neutre en carbone, sans avoir consenti d’efforts de réductions !
Le GERES milite pour d’avantage d’éthique en matière de finance carbone. Il ne s’agit pas de dénigrer un mécanisme qui propose un certains nombre de réponses, mais d’inciter à plus d’humilité face aux enjeux des changements climatiques.
A cet effet, le programme CO2Solidaire sensibilise ses partenaires ? entreprises, collectivités, associations ? à ne pas revendiquer de neutralité carbone, au profit d’une plus grande rigueur et transparence en matière de réduction à la source de leurs propres émissions de gaz à effet de serre.
Les entreprises mais aussi les opérateurs de compensation carbone doivent être conscients que cette dernière n’est pas LA solution aux changements climatiques. Sans être moralisateur, le GERES, à travers CO2Solidaire, souhaite proposer une vision différente de la compensation carbone et ainsi alimenter un débat aujourd’hui nécessaire. Non seulement pour assainir les pratiques mais aussi pour faire tendre la compensation volontaire vers une dimension plus éthique.
La compensation peut être intégrée dans une démarche globale de Solidarité climatique, qui prône la cohérence de l’action (réduction à la source des émissions) et la considération de l’humain (bénéfices sociaux sur les projets soutenus).
Lorsqu’elle s’applique dans les pays en développement, la compensation doit s’accompagner :
– d’une sensibilisation à la vulnérabilité des populations du Sud face aux changements climatiques dans le but d’une réelle prise de conscience,
– de bénéficies socio-économiques concrets pour les populations concernées.
En effet, aux enjeux climatiques se superposent des enjeux humains, et aussi nécessaires que soient les projets purement environnementaux, les mécanismes liés à la lutte contre les changements climatiques doivent impérativement intégrer les principes du développement durable pour les populations et les territoires.
Pour le GERES, la compensation s’inscrit dans une logique de cofinancement des projets de développement mis en ?uvre sur le terrain. L’objectif n’est pas tant de réduire les émissions de ces pays que d’actionner le levier économique que représente la finance carbone. Celle-ci apporte en effet un complément de financement à des programmes basés le plus souvent sur l’accès et la maîtrise de l’énergie, dans une logique de développement responsable et intégré sur le long terme.
Il s’agit là de combattre le déni de responsabilité. Et si, plutôt que s’acheter une bonne conscience, on commençait par prendre et faire prendre conscience ?
En savoir plus : www.geres.eu et www.CO2solidaire.org
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