Le gendarme du nucléaire demande officiellement au groupe Areva de prendre en charge rapidement ses déchets radioactifs, stockés de manière temporaire, depuis parfois des dizaines d’années dans son usine de retraitement de La Hague dans la Manche. L’ASN évoque des fuites possibles sur le site situé dans le Cotentin.
Selon une information révélée par l’Autorité de sûreté nucléaire elle-même hier, l’ASN va « obliger » le groupe français à s’occuper de ses déchets radioactifs mal stockés près de son usine normande de retraitement de La Hague. Cela fait 20 ans qu’Areva promet de s’attaquer à ce problème, souligne l’autorité française.
A l’occasion d’un bilan annuel hier, Thomas Houdré, le responsable de l’ASN à Caen a précisé que la question du conditionnement de ces déchets radioactifs est un « point qui soucie clairement » le gendarme du nucléaire. Ces déchets « assez radioactifs » ont été produits par l’usine de retraitement du site qui a fonctionné entre 1966 et 2002 Un millier de tonnes de déchets stockés dans du « béton qui vieillit » serait concerné par cette obligation de reconditionnement.
Fuites possibles
Si les déchets produits à partir de 2000 ont été conditionnés correctement, ce n’est pas le cas des déchets stockés avant 2000, et en particulier les plus anciens, précise l’AFP. Et cette négligence a des conséquences qui pourraient se révéler graves. Les risques de fuites radioactives concernent « essentiellement l’environnement » mais pourraient aussi avoir des conséquences sur la santé humaine, précise Thomas Houdré.
Cette situation est dénoncée depuis de nombreuses années par les associations écologistes. Par ailleurs, la CRIIRAD (Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité) a souligné à plusieurs reprises les dangers de ces stockages de déchets radioactifs, en principe temporaire. Les relevés de ce laboratoire ont fréquemment identifié des situations inquiétantes en la matière.
Sans en apporter la preuve, l’ASN n’exclut pas l’existence de fuites. Si Areva surveille depuis peu ces déchets de manière quotidienne, l’autorité précise que jusqu’à récemment, Areva ne surveillait ces déchets qu’une fois toutes les deux semaines. « Au début des années 90, Areva parlait de démarrer les travaux en 1997. Aujourd’hui, rien de significatif n’a été fait », regrette Thomas Houdré.
Plusieurs centaines de millions d’euros
Désormais il est grand temps d’agir. Mais le reconditionnement sera « difficile ». Car pour Eric Zelnio, chargé de ce dossier à l’ASN « c’est un peu comme pour la vaisselle, il est plus facile de la faire juste après le repas que plusieurs jours après ». Selon l’estimation de l’ASN, la facture de ces opérations, qui pourraient prendre une dizaine d’années, devrait se compter en centaines de millions d’euros.
Du côté d’Areva, on s’étonne de la réaction de l’ASN. Le porte-parole du groupe expliquait hier être « extrêmement surpris des propos alarmistes de l’ASN concernant ces déchets qui font l’objet d’une surveillance régulière et sont entreposés de manière sûre ». Ces déchets nucléaires vont être « repris, reconditionnés, dans le cadre de notre politique de démantèlement et de reprise des déchets, communiquée à l’ASN et rendue publique depuis plusieurs mois » affirme le groupe nucléaire.
Ces déchets ne présentent « aucun problème en termes d’environnement ou en termes sanitaires » et « il n’y a ‘aucune fuite concernant ces entreposages de déchets » précise le responsable communication d’Areva.
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