La Commission européenne a présenté hier une proposition de règlement visant à prévenir les manipulations de cours et les opérations d’initiés sur les marchés de gros de l’énergie. L’objectif est de garantir la transparence des marchés en obligeant les négociants en énergie à se conformer à des règles claires. Les marchés de gros, sur lesquels le gaz et l’électricité font l’objet d’échanges entre producteurs et négociants, jouent un rôle essentiel dans la fixation du prix de vente aux consommateurs finaux.
Günther Oettinger, commissaire européen responsable de l’énergie, explique que « nos marchés de l’énergie sont interdépendants. Les abus de marché qui se produisent dans un État membre affectent souvent les prix dans un autre État membre. Il est indispensable de mettre en ?uvre, à l’échelle de l’Union, des règles exhaustives qui donnent aux citoyens l’assurance que les prix sont fixés de manière équitable et qu’ils peuvent profiter de tous les avantages du marché intérieur de l’énergie« .
Le nouveau règlement vise à s’assurer que les négociants ne peuvent pas utiliser des informations privilégiées pour tirer profit de leurs transactions ou manipuler le marché en provoquant une hausse artificielle des prix, c’est-à-dire qui n’est pas justifiée par des raisons liées à la disponibilité, au coût de production ou à la capacité de stockage ou de transport de l’énergie. Le règlement interdit notamment l’utilisation d’informations privilégiées au moment de vendre ou d’acheter sur les marchés de gros de l’énergie. Les informations exclusives et déterminantes pour le prix devraient être divulguées avant que les échanges ne puissent avoir lieu.
Ce nouveau règlement interdit également les transactions qui donnent un signal faux ou trompeur sur l’offre, la demande ou le prix des produits sur les marchés de gros de l’énergie ainsi que la propagation de fausses informations ou de rumeurs qui envoient un signal trompeur sur ces produits.
L’ACER en gendarme
C’est l’Agence européenne de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER) qui sera responsable de la surveillance du marché en vue de détecter les éventuels cas d’abus. Pour ce faire, elle doit pouvoir accéder en temps utile aux informations complètes sur les transactions qui ont lieu sur les marchés de gros de l’énergie, notamment celles sur les prix, les volumes échangés et les contreparties concernées. Les données seront également communiquées aux autorités nationales de régulation qui seront aussi chargées de mener une enquête fouillée sur les soupçons d’abus. Dans les cas complexes où plusieurs pays sont concernés, c’est l’ACER qui coordonnera les enquêtes. Quant aux sanctions, elles seront appliquées par les autorités nationales de régulation dans les États membres.
Cette législation spécifique est nécessaire pour que la surveillance de l’ensemble du marché de gros de l’énergie (marché de dérivés et marché au comptant) soit dévolue à un seul organisme. La directive sur les abus de marché et la directive concernant les marchés d’instruments financiers ne couvrent que les marchés et transactions de produits dérivés.
Un contexte transnational
Les prix sur les marchés de gros jouent un rôle fondamental dans la fixation du prix de vente aux particuliers et aux utilisateurs industriels. Plus que dans les autres secteurs, les prix du marché sont très sensibles à la disponibilité des capacités de production et de transport, car l’électricité ne peut pas être stockée en grandes quantités. Il est donc facile d’influencer les prix en créant une impression erronée sur la disponibilité des capacités, voire en réduisant la production réelle.
Les marchés de gros de l’énergie en Europe ont un caractère de plus en plus transnational. La fixation des prix ne dépend pas d’un seul pays, mais est déterminée par la rencontre de l’offre et de la demande dans les différents pays concernés. Par exemple, les prix de l’électricité aux Pays-Bas pourraient être fortement influencés par la disponibilité et le coût de production en Allemagne ou la variation de la demande en France. De plus, les marchés de gros se composent de plusieurs plateformes. Les transactions sont souvent réalisées en dehors du pays auquel elles se rapportent. Cette situation présente des avantages pour l’intégration du marché, mais ouvre la voie à des pratiques abusives qui se jouent des frontières nationales. Pour déceler et décourager efficacement de telles pratiques, il convient d’examiner simultanément plusieurs marchés nationaux.
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