Le rapport annuel 2011 de la Cour des comptes s’est intéressé cette année au mécanisme « méconnu » de la compensation des charges du service public de l’électricité (CSPE). Très critiques sur le mode de fonctionnement actuel de la CSPE, et ses dérives, la haute juridiction financière préconise de clarifier cette compensation dont la facture n’en finit pas de grimper.
Méconnue, la contribution aux charges de service public de l’électricité (CSPE) représente pourtant « un montant substantiel », de 1,7 milliard d’euros en 2009. La plupart du temps sans le savoir, cette contribution est réglée directement par les consommateurs lorsqu’ils payent leurs factures d’électricité.
La CSPE sert à compenser des charges inhérentes au service public de l’électricité supportées par divers opérateurs du marché de l’électricité : essentiellement, le soutien aux énergies renouvelables et à la cogénération, la péréquation tarifaire dans les départements d’outre-mer et en Corse et les tarifs sociaux de l’électricité, rappelle la Cour des Comptes. Depuis sa création le 3 janvier 2003, les charges que la CSPE ont augmenté « rapidement et de façon incontrôlée », tandis que le taux de la contribution est, lui, resté inchangé, à 4,5 ?/MWh jusqu’à fin 2010, s’étonne le rapport 2011.
La « place prépondérante » de l’énergie solaire et éolienne
Entre 2004 et 2009, le total des charges de service public au titre de cette CSPE est ainsi passé de 1,53 milliard à 2,66 milliards d’euros. La Cour des comptes précise que les tarifs sociaux, « bien qu’en forte croissance », n’occupent encore qu’ « une place marginale » (3,2 % en 2008).
De son côté, la péréquation tarifaire, dans les départements d’outre mer et en Corse est passée de 23 % en 2004 à plus de 45 % en 2009. Les achats d’énergie, qui résultent du soutien aux énergies renouvelables et à la cogénération, occupent « une place prépondérante », de près des deux-tiers du montant des charges souligne le rapport.
Au sein du soutien aux énergies renouvelables, les filières éolienne et photovoltaïque prennent « une importance grandissante ». Rapportée au volume total de l’électricité achetée, cette filière ne passerait que de 0,07 % en 2008 à 0,8 % en 2010, mais son poids relatif dans les charges compensées par la CSPE augmenterait dans le même temps de 0,9 % à 10,3 % précise la Cour des comptes.
Un « déséquilibre croissant »
L’assiette de la CSPE a progressé moins vite que les charges. Il en résulte « un déséquilibre croissant du mécanisme de compensation », essentiellement supporté par EDF, qui assume plus de 95 % des charges du service public de l’électricité. L’entreprise chiffre le déficit cumulé de recouvrement de CSPE à 2,6 milliards d’euros fin 2010 selon le rapport.
Pour 2011, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) estime les charges prévisionnelles à 3,47 milliards d’euros. Elle évalue à 12,90 ?/MWh, la contribution qui serait nécessaire pour les compenser.
Le rapport note la volonté gouvernementale de trouver des réponses à cette situation, avec des « mesures correctrices » comme la loi de finances pour 2011 qui permet l’augmentation de 3 ?/MWh de la CSPE, dont le montant total est ainsi porté à 7,5 ?/MWh. Votée dans une relative indifférence, cette loi devrait tout de même au passage se traduire par une hausse moyenne de 18 euros de la facture annuelle d’électricité des Français.
Pourquoi soutenir la cogénération ?
Dans le même temps, la Cour enregistre le nouveau processus de régulation en cours dans la filière solaire. Cependant, le rapport considère que ces correctifs n’apportent « pas de véritable remède à la dérive structurelle du système actuel ».
La haute juridiction financière préconise 4 recommandations pour mettre fin à cette dérive. Il s’agit tout d’abord de maîtriser les facteurs de croissance des charges du service public de l’électricité, au premier rang desquelles figure le système de l’obligation d’achat, à des tarifs trop attractifs, fonctionnant « à guichet ouvert » selon les termes de la Cour des comptes.
Par ailleurs, le rapport conseille de « s’interroger sur l’opportunité de continuer à soutenir des filières qui ne figurent pas parmi les priorités gouvernementales en matière de politique énergétique, comme la cogénération », de « remettre à plat le dispositif d’ensemble afin d’en rendre le fonctionnement plus lisible et d’en clarifier le statut fiscal » et enfin de « réexaminer le financement du soutien au développement des énergies renouvelables par le consommateur d’énergie ».
La facture polémique des énergies renouvelables
Dans son rapport 2011, la Cour des comptes s’interroge à haute voix, pour savoir s’il est « justifié de faire reposer une part essentielle du financement du soutien au développement des énergies renouvelables et des autres charges du service public de l’électricité sur le seul consommateur d’électricité ». Pour les experts des comptes publics, la réponse semble être dans la question.
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