Les marées noires ne polluent pas uniquement les mers du globe mais aussi les eaux intérieures. L’association Robin des Bois a recensé 643 « marées noires intérieures » en France entre 2008 et 2010, un chiffre en forte augmentation.
L’atlas 2004-2007 de l’association de protection de l’homme et de l’environnement recensait 561 pollutions soit une moyenne annuelle de 140. L’atlas 2008-2010 publié hier par Robin des Bois en recense 643, soit une moyenne de 214. Dans un silence assourdissant, la pollution de nos cours d’eau progresse dans une totale indifférence.
« Le fléau des hydrocarbures bat son plein dans les fleuves, les rivières, les canaux et les plans d’eau » s’alarme les écologistes. Malgré les orientations et les engagements du Grenelle de l’Environnement et du Grenelle de la Mer, l’inventaire, la mémorisation, la centralisation et la prise en considération environnementale et pénale de ces pollutions de tous les jours stagnent et même régressent.
Le réseau hydrologique français est impacté par des micropolluants persistants au premier rang desquels les PCB révèlent les chiffres de l’atlas. De par leur présence, tous les bassins font l’objet de restrictions ou d’interdictions de pêche depuis 2005. Ceci n’empêche pas les pollutions par hydrocarbures de se perpétuer et de s’amplifier, « dans l’indifférence des pouvoirs publics » s’indigne Robin des Bois.
Les poids lourds, premiers pollueurs
Un changement est constaté dans le classement des causes identifiées. Les accidents de transport impliquant en premier lieu des poids lourds sont désormais à la première place. Aujourd’hui, le bloc moteur d’un camion contient 50 litres d’huile et ses réservoirs 1.200 litres de gazole ; ils sont exposés et vulnérables aux mauvaises man?uvres, aux accrochages et aux chocs. Il y a là « un effet inattendu et négatif pour l’environnement de la course au gigantisme du transport routier » souligne l’association.
La deuxième cause des pollutions des eaux douces par les hydrocarbures, c’est la maintenance dégradée, la vétusté, ou l’abandon des cuves à fioul de chauffage. Ainsi, les pollutions par hydrocarbures d’origine industrielle passent, par rapport à l’édition antérieure 2004-2007, de la 1ère place à la 3ème dans le classement des responsabilités selon l’atlas 2008-2010. Ce recul pourrait correspondre à la désindustrialisation et être malheureusement compensé par la tendance à l’augmentation des pollutions en provenance des friches industrielles et sites pollués.
Les pollutions d’origine agricole ? vidanges intempestives des cuves à fioul ou à gazole ? sont en augmentation très sensible et passent de la 8ème place à la 4ème dans cette nouvelle édition de l’atlas des marées noires. Le surcoût du fioul et des carburants ne dissuade pas les négligences ou les erreurs de manipulation relève les écologistes.
Dégazages en rivières
Le développement du transport et du tourisme fluvial se traduit par une augmentation proportionnelle des dégazages. Dans le domaine judiciaire, « l’énorme fossé subsiste entre les dégazages en mer et les dégazages en rivières et canaux » souligne Robin des Bois, alors que les quantités rejetées en hydrocarbures sont dans certains cas du même ordre de grandeur et que les capacités de dilution des eaux douces sont inférieures à celles des eaux marines.
Une légère diminution des marées noires en eaux intérieures est observée dans le secteur de la livraison des carburants. Toutefois des erreurs de manipulation stupéfiantes comme le remplissage des cuves désaffectées dans une gendarmerie ou une station de sports d’hiver sont remarquées. Il est trop tôt pour savoir si cette diminution reflète sur l’ensemble du territoire une meilleure instruction des chauffeurs livreurs et une meilleure coordination avec les clients, précise l’atlas.
Par ailleurs, une augmentation sensible des pollutions consécutives aux Travaux Publics est repérée. Il s’agit dans la plupart des cas d’une mauvaise maintenance des engins et d’une mauvaise connaissance de l’environnement, ce qui aboutit à des agressions de canalisation selon les écologistes. Les pollutions causées par des inondations, notamment par la faute des cuves à fioul désarrimées, font une apparition significative. Dans le dernier inventaire, elles étaient pratiquement inexistantes.
Impacts négligés
Dans la quasi-totalité des cas, les impacts des pollutions par hydrocarbures sont négligés souligne Robin des Bois. C’est pourtant le seul polluant qui condamne la faune, la flore, les oiseaux et les poissons à une triple peine : le colmatage et l’engluement, la longue dégradation de l’habitat et la bioaccumulation de micropolluants toxiques et persistants comme les métaux lourds et les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques s’indigne l’association.
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