Par l’AFIS (Association Française pour l’Information Scientifique) qui regroupent des dizaines de scientifiques reconnus qui souhaitent promouvoir la science contre la désinformation, le sensationnalisme et l’irrationnel. L’AFIS dénonce l’hypocrisie gouvernementale vis-à-vis de la question des OGM.
Le maïs OGM résistant à un insecte, la pyrale existe depuis 15 ans et il a été adopté par un certain nombre de pays. Il a reçu l’accord de la Commission Européenne pour être cultivé dans tous les pays de l’UE. Il a été réévalué dix ans plus tard, comme le prévoient les règles européennes, et reconduit. Les Espagnols et les Portugais l’ont massivement adopté. Six pays de l’UE, dont la France, ont fait jouer une clause de sauvegarde qui n’est autre qu’un moratoire déguisé, pour ne pas reconduire l’autorisation de cultiver ce maïs OGM. L’UE a considéré la clause de sauvegarde française comme non conforme au droit européen. Le Conseil Constitutionnel Français vient de confirmer ce point.
La France considère que l’anomalie ne porte que sur des procédures et non sur le fond. Plusieurs Ministres et le Chef de l’Etat en personne ont annoncé qu’une nouvelle clause de sauvegarde sera de toute façon appliquée et qu’ils finiraient par trouver un moyen juridique acceptable pour soutenir la nouvelle clause de sauvegarde. Le but est donc d’interdire le maïs OGM indépendamment de toute justification scientifique, pour complaire à des groupes de pression. Les arguments invoqués concernent la biosécurité et le fait qu’il n’y a rien eu de nouveau sur le maïs OGM. Selon le gouvernement en effet, seules des études nouvelles disculpant le maïs en question pourraient permettre de lever la clause de sauvegarde. Les risques alimentaires ne sont plus aussi clairement évoqués car décidément trop dépourvus de crédibilité. Ce sont donc les risques environnementaux qui sont davantage mis en avant.
Les arguments sont faux dans les deux cas. L’ANSES a procédé à une étude particulièrement approfondie sur les méthodes d’analyse statistique de l’évaluation des tests de toxicité des OGM. Cette étude théorique appliquée au maïs OGM a fait apparaitre avec une grande clarté que les conclusions des différentes agences dans le monde publiées depuis des années, y compris par l’ANSES et l’EFSA, sont très largement confirmées (1). Ce maïs OGM ne présente donc pas plus de risque alimentaire que les variétés de maïs conventionnelles commercialisées. Au lieu de reconnaitre les conclusions de cette étude qui ont une portée internationale, le Ministère développe une argumentation pour le moins étrange. Selon le Ministère, l’ANSES, en raffinant les analyses statistiques, aurait prouvé que les méthodes de l’EFSA sont inappropriées et donc que ses conclusions restent incertaines. Elles étaient au contraire pertinentes puisque des méthodes plus élaborées amènent exactement aux mêmes conclusions.
Les arguments environnementaux ne sont pas plus justifiés. Les publications montrant que le la dissémination du maïs, génétiquement modifié ou non, est très limitée et n’engendre pas de problèmes de sécurité particulier, sont de plus en plus nombreuses et leurs résultats sont convergents. Il en est de même pour les effets environnementaux de la protéine toxique pour les pyrales et présente dans le maïs OGM. Ces effets se situent entre ceux des traitements par des pesticides classiques et l’absence de traitement (2, 3). Les maïs résistants aux insectes nécessitent par ailleurs moins de pesticides et ils contiennent moins de mycotoxines cancérigènes comme la fumonisine (4).
Tout comme lors de la décision initiale, il n’y a pas de base scientifique pour appliquer une deuxième clause de sauvegarde au maïs OGM. Si pour des raisons économiques, sociales ou politiques, le gouvernement souhaite adopter telle ou telle position, c’est sa responsabilité et sa légitimité, mais il y a imposture à invoquer des raisons scientifiques inexistantes, et à instrumentaliser l’expertise, au risque de contribuer à discréditer le service public de l’expertise scientifique.
1. Recommandations pour la mise en oeuvre de l’analyse statistique des données issues des études de toxicité subchronique de 90 jours chez le rat dans le cadre des demandes d’autorisation de mise sur le marché d’OGM. http://www.anses.fr/Documents/BIOT2009sa0285Ra.pdf
2. Carpenter J.E. 2011, Impacts of GM crops on biodiversity GM Crops 2, 1-17
3. Ricroch A. E. et al 2010, Is the German suspension of MON810 maize cultivation scientifically Transgenic Research 19, 1-12
4. Folcher L. et al , 2010, Lower mycotoxin levels in Bt maize grain. EDP Sciences, DOI:10.1051/agro/2010005 (www.agronomy-journal.org)
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