Paul Mennecier, chef du service de l’alimentation à la Direction générale de l’alimentation, qui apporte des précisions très « officielles » à la polémique récemment lancée sur la viande halal et ses risques sanitaires, son absence d’étiquetage et ses conséquences en termes de souffrance animale.
Les Français mangent-ils de la viande « halal » sans le savoir ?
Ce sujet a été bien identifié. Il existe en effet des situations dans lesquelles l’offre de viande halal sortie des abattoirs et la demande en viande abattue rituellement ne sont pas en adéquation parfaite. Il arrive que de la viande abattue rituellement se retrouve dans le circuit classique.
La polémique lancée sur la viande « halal » révèle la difficulté d’obtenir les chiffres officiels de cette production, quels sont-ils ?
Ils sont limités. Globalement en France, seulement 14% de la viande produite est abattue rituellement. Ce n’est pas un phénomène généralisé. Néanmoins, pour s’assurer d’une meilleure adéquation entre l’offre et la demande, il a été prévu de renforcer l’encadrement de la pratique de l’abattage rituel sans étourdissement.
A partir du 1er juillet 2012, compte tenu des textes publiés fin décembre, tous les abattoirs qui souhaitent recourir à l’abattage rituel sans étourdissement, seront tenus de fournir des justificatifs des commandes reçues spécifiquement pour cette filière rituelle.
Pourquoi l’abattage « halal » est-il en augmentation en France, est-ce pour des raisons purement religieuses et communautaires ou également économiques ?
Nous avons peu de statistiques sur la viande halal mais uniquement des chiffres issus d’enquêtes que nous réalisons ponctuellement. Nous n’avons pas noté d’évolution ni d’augmentation de la pratique de l’abattage rituel en France.
Confirmez-vous que la quasi-totalité des abattoirs d’Ile-de-France sont « halal » ?
Oui, mais la région Ile-de-France n’est pas une région d’abattage. Il s’agit en l’espèce de petits abattoirs qui produisent tous ensemble seulement 5 000 tonnes par an, ce qui est très faible, mais qui répondent à des besoins de proximité.
Cette pratique d’abattage est-elle légale, ou dérogatoire ?
Les deux. Cette pratique est légale et dérogatoire. Le droit européen prévoit parfaitement que cet abattage sans étourdissement puisse être autorisé. Par ailleurs, les autorités françaises garantissent le principe constitutionnel de la liberté d’exercice des cultes.
En quoi consiste précisément cet abattage ?
L’abattage rituel correspond à des spécifications qui sont émises par les autorités religieuses. Il se distingue de l’abattage classique notamment par la pratique de l’égorgement.
L’abattage « halal » pose évidemment la question de la souffrance animale, pourquoi ne pas exiger au minimum l’étourdissement préalable à cette pratique, comme le font certains pays européens et même certains pays musulmans ?
Cette pratique est totalement autorisée par l’Union européenne, même si nous devons veiller dans le même temps à ce qu’il ne soit pas infliger de souffrance inutile aux animaux.
Certains professionnels estiment que cette pratique plus sanglante, augmenteraient les risques sanitaires, qu’en est-il ?
Il y a deux aspects. S’agissant des viandes mises sur le marché, qu’elles proviennent d’un abattage classique ou rituel, elles ne présentent pas de différence en termes de risques sanitaires. Après, il existe des points de vigilance particuliers pendant la chaîne d’abattage rituel. Tout procédé dans l’industrie agroalimentaire nécessite une adaptation des procédures.
Alors qu’on développe partout l’étiquetage et la traçabilité, pourquoi cette viande « halal » n’est pas clairement identifiée ?
Cette question est importante. Les professionnels peuvent répondre aux attentes des consommateurs de manière volontaire en prévoyant un système d’information loyal sur la question. Il y a d’ailleurs déjà des opérateurs qui le font.
Mais sur le plan réglementaire ?
Cela a été discuté sur le plan européen mais l’étiquetage de l’abattage n’a pas été jugé pertinent ni opportun par les autorités européennes.
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