Un an après avoir lancé une vaste enquête collaborative, 60 Millions de consommateurs, avec la fondation France libertés et le média social Owni publient les résultats de « l’opération transparence ». Se basant sur 4 000 factures d’usagers, l’étude révèle notamment l’opacité du calcul des prix, des tarifs totalement disparates en fonction des communes et souvent injustes.
L’étude qui a sélectionné 220 factures en respectant les parts de marché des principaux intervenants, tire 7 principales leçons. Tout d’abord, la facture d’eau représente « une véritable usine à gaz » répartie en 3 postes : distribution, assainissement collectif et taxes et redevances ce qui complexifie l’ensemble avec des dates différentes, et des intitulés « ésotériques » qui participe à un véritable « embrouillamini ».
L’enquête par ailleurs considère que les prix de l’eau représentent une vraie « loterie » tant ils diffèrent en fonction des communes, variant de 1 à 3 voire à 5, établis par exemple à 2,26 ?/m3 à Divonne-les-Bains (Ain) ou Cabrières (Gard), jusqu’à 7,05 ?/m3 à Plouha (Côtes-d’Armor). L’étude souligne également que moins on consomme, plus c’est cher au litre.
Moins on consomme, plus on paye cher
Ainsi, déjà importants entre communes, les écarts se creusent encore plus lorsqu’on prend en compte non pas la consommation théorique de 120 m3, mais la consommation réelle. Chaque facture comprenant une part fixe liée à l’abonnement, « moins vous utilisez d’eau, plus vous payez cher au litre ! » affirme 60 millions de consommateurs qui rappelle que le tarif dégressif de l’eau serait en principe interdit. Comment inciter les usagers à préserver la ressource, si chaque litre économisé se traduit par une augmentation de son prix unitaire s’interroge les auteurs de l’enquête.
L’étude remarque également que les factures sont particulièrement salées pour les propriétaires de résidences secondaires, dont la consommation est le plus souvent pourtant dérisoire, le logement n’étant occupé généralement que quelques semaines par an. Pourtant la facture est rarement dérisoire, atteignant même parfois de « véritables sommets tarifaires » en moyenne autour de 20 ? le m3, très loin des 3 ? le mètre cube, présentés dans toutes les statistiques officielles, remarque 60 millions de consommateurs.
Et ce n’est pas tout. L’enquête remarque également que « les factures sont loin d’être limpides ». Si les 220 factures examinées à la loupe sont globalement conformes à l’arrêté de 1996 qui les réglemente, « entre la conformité et la lisibilité, il y a un pas que les opérateurs ont du mal à franchir » affirme les auteurs de l’étude, qui fait état d’augmentation en cours d’année, mais sans dates, ou de facturation par tranches de consommation, mais sans préciser lesquelles.
A quand une véritable progressivité des tarifs de l’eau ?
L’étude regrette par ailleurs un traitement impersonnel des clients, qui rappellent qu’avec 220 ? par habitant et par an, les sommes consacrées au service de l’eau sont pourtant « loin d’être négligeables ». L’enquête évoque des usagers qui paient pour un assainissement inexistant, des pénalités de retard incohérentes? autant d’injustices, et qui alimentent « le sentiment sourd que le buveur d’eau est parfois pris pour une vache à lait ».
Enfin 60 millions de consommateurs remarque « la transparence s’arrête au pied des immeubles ». Rappelant que plus de 40 % des Français vivent en habitat collectif, qu’ils soient locataires ou copropriétaires, seule une minorité dispose d’un véritable compteur individuel et donc d’un contrat à son nom, leur information ne se limitant en l’espèce à une vague ligne dans les charges récupérables.
Au regard de ces griefs, les auteurs de l’enquête demandent des factures plus compréhensibles, avec une révision de l’arrêté de 1996 qui les encadre ; des tarifs plus équitables, avec l’instauration d’un tarif social et la généralisation d’une véritable progressivité des tarifs du service de l’eau ; que la loi oblige les collectivités à transmettre les indicateurs clés de performance à l’Observatoire national de l’eau, pour que la transparence soit effective sur l’ensemble du territoire ; enfin un état des lieux des investissements qui auraient dû être consacrés à la rénovation des canalisations, et qui ne l’ont pas été.
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