La population se réveille avec une forte odeur de gaz. Les yeux picotent, la gorge est irritée, certains ont des nausées ou des maux de tête. Elle apprend alors que cela vient d’une fuite d’une usine chimique à Rouen. La « boule puante » se fait sentir même au sud de l’Angleterre, en fonction des vents. Il parait plus que normal d’être inquiet. Malheureusement, la communication est approximative?
Une communication un peu légère?
Deux réponses arrivent. La Préfecture répète en boucle : « ce n’est pas toxique, ce n’est pas toxique… ». L’entreprise, quant à elle, précise que ce sont des mercaptans qui peuvent donner des maux de tête et des nausées. La ministre de l’Ecologie évoque que « tout est sous contrôle » mais on ne publie pas les mesures de concentration dans l’air en temps réel via le site Air Normand.
« Cette communication calamiteuse vient d’une seule chose. Ni la Préfecture ni l’industriel ne voulaient communiquer avant que la situation soit sous contrôle. Ils l’ont fait en urgence suite aux milliers d’appels avec un seul objectif : rassurer, rassurer, rassurer. » explique Maryse Arditi, responsable du Réseau Risques et Impacts industriels (RRII) de FNE.
Une mise en ?uvre correcte et réglementaire du plan particulier d’intervention (PPI) aurait nécessité l’information immédiate des riverains, en particulier les établissements recevant du public et les populations plus vulnérables à ces problèmes de pollution (insuffisance respiratoire des enfants).
Quelques questions sanitaires en suspens
Le mercaptan en question est du methyl mercaptan qui est le plus toxique, en particulier lorsqu’il est inhalé. Il est donc essentiel de connaître les concentrations qui ont été atteintes autour de l’usine, à cinq kilomètres, à dix kilomètres et jusqu’à Paris. Quelles mesures ont été faites depuis le début de l’accident par Air Normand et où trouver les résultats ? Malgré les éléments de discours rassurants, on remarquera l’annulation du match du football probablement lié au fait que la situation n’était toujours pas sous contrôle?
Un « dérèglement de processus chimique hors contrôle »
Il ne s’agit pas d’une « fuite » mais, d’après l’exploitant lui-même, de la perte de contrôle d’un processus industriel impliquant des substances dangereuses, ce qui est infiniment plus grave. Cet accident n’est toujours pas sous contrôle et il faut rappeler que l’usine a déjà connu le 23 aout 1989 un accident du même type avec le rejet de cinq kilos de mercaptan qui, d’après le BARPI (1), ont incommodé de nombreuses personnes du voisinage. D’où un certain nombre de questions :
– quelles leçons ont été tirées de ce premier accident ?
– le scenario de perte de contrôle de cette réaction chimique est il prévu dans l’étude de dangers ? Si oui, quels moyens ont été mis en ?uvre pour l’éviter et à défaut en limiter les conséquences ?
– cette usine devenue Seveso seuil haut depuis 2009 a-t elle suffisamment de compétences pour répondre aux exigences de cette réglementation, notamment pour ce qui concerne le Système de Gestion de la Sécurité et la formation du personnel ?
FNE appuie sa fédération régionale Haute-Normandie Nature Environnement (HNNE) qui demande la réunion en urgence du CLIC (2), la publication de l’enquête administrative sur les causes ainsi que la révision de l’étude de dangers pour prendre en compte le retour d’expérience dans les meilleurs délais pour toutes les installations ayant des activités similaires.
1 Bureau d’Analyse des Risques et Pollutions industrielles
2 Comités Locaux d’Information et de Concertation
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