Pierre Pernot, ingénieur prévisionniste chez AirParif. A quelques heures du marathon de Paris, l’expert en pollution de l’air de l’association créée par le ministère de l’Environnement, fait le point sur la situation actuelle dans le ciel parisien et plus globalement sur la pollution atmosphérique dans la capitale et ses environs.
Après plusieurs dépassements récents des niveaux de pollution en Ile-de-France, quelle est la situation actuelle dans le ciel parisien à quelques heures du marathon ?
On enregistre actuellement des niveaux de particules assez soutenus, supérieurs à 50 mg/m3 en moyenne journalière, ce qui correspond au seul d’information, le seuil d’alerte se situant à 80 mg / m3.
Avez-vous la possibilité de prévoir le niveau de pollution de l’air à Paris lors du marathon de Paris ?
C’est encore un peu trop tôt, mais on sait déjà que le vent reste pour l’instant orienté au Nord-Est avec un air chargé en particules. Reste à connaître le comportement des masses d’air au fil des heures et l’impact des précipitations attendues dans les prochaines heures.
Que se passe-t-il lors la pollution de l’air dépasse les 50 mg/m3 ?
A partir du seuil d’information, des informations sont données à la population concernée et en particulier à celle plus sensible à la pollution atmosphérique : les enfants, les personnes âgées, les asthmatiques ou encore les insuffisants respiratoires chroniques. L’Agence régionale pour la santé recommande à ces personnes d’éviter les activités physiques intenses.
Et au-dessus de 80 mg/m3 ?
A ce stade, on passe au seuil d’alerte. Des recommandations beaucoup plus fortes sont émises pour les populations concernées et des mesures de restrictions d’émissions de polluants peuvent être engagées par la Préfecture de police.
Plus globalement, la pollution de l’air en Ile-de-France est-elle en augmentation ces dernières années ?
Tout dépend des polluants dont on parle. S’agissant de certains polluants comme le benzène ou le dioxyde de souffre, la tendance est à la baisse depuis plusieurs années. En revanche, d’autres polluants dans l’air sont plutôt stables. C’est le cas des particules et du dioxyde d’azote. Actuellement, 3 millions de Franciliens sont régulièrement soumis à un air pollué, au-delà des seuils réglementaires. (cf Bilan de la qualité de l’air 2012 publié par Airparif).
Quels sont les principaux responsables de cette pollution aux particules ? Le trafic routier, l’industrie, les habitations ?
L’origine de cette pollution est très complexe à établir. Ces particules sont bien sûr émises directement dans l’air par le trafic routier mais aussi le secteur résidentiel avec le chauffage au bois et le secteur tertiaire. Mais ce polluant voyage aussi énormément. Les particules très fines peuvent se déplacer à l’échelle de continent, voire plus. Et enfin, ces particules peuvent ne pas être émises directement dans l’air, mais se former dans l’atmosphère au contact d’autres composés.
Dispose-t-on de pourcentages en la matière ?
Cela dépend bien entendu notamment de l’endroit où sont effectuées ces mesures. Mais pour donner un exemple, à proximité du trafic routier, on peut considérer qu’en moyenne 40% des particules sont issues du trafic routier, 20% sont émises par l’agglomération parisienne (chauffage, industrie et formation indirecte dans l’air) et enfin 40% proviennent de l’extérieur, ces particules ayant voyagé dans l’atmosphère pour arriver en Ile-de-France.
Comment se situe la pollution en Ile-de-France par rapport aux autres régions françaises et à nos voisins européens ?
On enregistre en Ile-de-France des niveaux de pollution beaucoup plus élevés que dans les autres régions françaises, notamment en matière de dioxyde d’azote et de particules. Mais s’agissant d’autres polluants comme l’ozone par exemple, des villes comme Marseille enregistrent des niveaux plus importants.
Et par rapport à des villes européennes comparables ?
Paris peut être comparé à Londres. Les deux agglomérations sont comparables et enregistrent des niveaux de pollutions assez proches. Cela s’explique par l’importance de la population et du trafic routier dans ces deux villes.
Quels sont les polluants les plus inquiétants selon vous ?
En dépassant dépassent régulièrement les niveaux de pollution acceptables, le dioxyde d’azote et les particules représentent les polluants les plus dangereux. Il faut rappeler que cette pollution de l’air provoque le décès de 42 000 personnes chaque année en France.
Ce chiffre de 42 000 décès évoqués notamment par plusieurs ministres du gouvernement fait justement l’objet d’un début de polémique. Il daterait d’une étude européenne publiée en 2000, et n’aurait pas été réévalué depuis. Ce chiffre est-il réellement crédible ? Avez-vous des éléments d’information en la matière ?
Ce chiffre a servi pour la rédaction de la directive européenne de 2008. Des travaux sont actuellement en cours sur la question, réalisés notamment par l’OMS, mais ils n’ont pas encore été publiés.
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