Par Marc Fellous, Professeur de génétique à l’Université Paris Diderot et Institut Cochin. Président de l’Association Française des Biotechnologies Végétales (AFBV) et Yvette Dattée, Membre de l’Académie d’Agriculture de France, directrice de recherche honoraire de l’INRA. Elle a été présidente d’ EUCARPIA, (Association Européenne pour l’Amélioration des Plantes) et directrice du GEVES (Groupe d’Etude et de contrôle des Variétés et des Semences). Secrétaire générale de l’Association Française des Biotechnologies Végétales (AFBV).
Il y a dans le monde 17 millions d’agriculteurs chinois, africains, indiens, américains du nord et du sud, parfois européens, qui cultivent dans le monde des plantes génétiquement modifiées (PGM) sur 170 millions d’hectares. Soit une moyenne de 10 hectares de PGM par agriculteur, une moyenne entre des surfaces plus grandes et des surfaces plus petites. Les PGM cultivées dans tous les continents profitent aussi aux petits agriculteurs.
Si les agriculteurs qui adoptent les PGM sont de plus en plus nombreux et fidèles à ce type de semence, ce n’est pas par obligation de les racheter mais par pur intérêt car ils y trouvent plus d’avantages que de contraintes : selon les cas un intérêt agroécologique (facilite le non labour), financier ( meilleure régularité des rendements), de meilleures conditions de travail ( moins de travaux dans les champs) ou des avantages pour leur santé ( beaucoup moins de traitements insecticides pour les cultures de PGM Bt). Ce sont des chefs d’entreprises pleins de bon sens et ils savent raisonner.
Les bénéfices existent bien pour les consommateurs
Contrairement à certaines opinions ou croyances très répandues il existe bien des PGM qui apportent des bénéfices aux consommateurs :
– C’est le cas du riz doré dont la recherche est aboutie mais qui n’est toujours pas autorisé à la vente. Pourtant ce riz doré GM apporterait à des millions de jeunes africains la quantité journalière de vitamine A dont ils ont besoin pour éviter de devenir aveugles. Les organisations anti OGM militent pour en interdire la commercialisation et démontrer ainsi par l’absurde que les OGM ne servent à rien pour les consommateurs des pays du Sud puisqu’il n’y pas d’utilisations?autorisées.
-Il existe aussi des productions fruitières et légumières GM. Grace à la transgénèse, on a sauvé à Hawaï la culture de la papaye indispensable pour le revenu des paysans locaux et très appréciée par les consommateurs et qui était en train de disparaître à cause d’un virus non destructible par un traitement chimique. D’autres pays en développement pourront profiter de ce progrès. Il existe aussi des pastèques sans pépin qui sont également issues des biotechnologies. On notera aussi des aubergines et des fleurs issues de la transgénèse.
Les PGM, un moyen de lutte efficace pour lutter contre les redoutées mycotoxines
On ne peut pas ignorer non plus que le maïs génétiquement modifié Bt permet de lutter efficacement contre certaines mycotoxines qui sont si cancérigènes pour les humains que des normes très strictes ont été mises en place pour éviter que du maïs contenant trop de mycotoxines soit commercialisé. Les éleveurs eux mêmes craignent la présence des mycotoxines dans l’alimentation de leurs animaux car elles diminuent leur prolificité. La présence de mycotoxines dans le maïs est donc un vrai problème sanitaire mondial qui ne peut que se développer avec le réchauffement climatique. Refuser d’utiliser des variétés GM pour lutter contre les mycotoxines est irresponsable. Oublier que ces variétés renforcent la sécurité sanitaire du consommateur est une grave erreur.
Les applications pour les consommateurs seraient déjà plus nombreuses si les chercheurs n’étaient pas interdits ou découragés de chercher. Ce fut le cas par exemple d’un blé sans gluten dont la recherche bien avancée a été suspendue sous la pression du lobby anti OGM. Ce fut le cas également en France pour des plantes susceptibles de produire un médicament efficace contre la mucoviscidose.
En ce qui concerne les risques éventuels des PGM, le discours contestataire met souvent en avant le développement de la résistance des mauvaises herbes consécutif à l’utilisation du désherbant Round up en laissant faussement penser que ce sont les PGM qui entrainent ces résistances à cet herbicide. Or tout cultivateur sait depuis longtemps que tout herbicide, qu’il soit utilisé avec une PGM ou une autre plante, est susceptible de développer un jour des résistances dans les mauvaises herbes des champs traités, surtout si les bonnes pratiques culturales, comme la diversification des molécules utilisées sur une même parcelle ou la rotation, ne sont pas respectées.
Autre critique classique : les cultures Bt qui résistent aux insectes nuisibles comme la pyrale, grâce à la libération d’une protéine insecticide, détruiraient aussi les insectes non ciblés. C’est complètement faux. Les publications relatant des effets négatifs des PGM Bt sur les coccinelles, le papillon monarque ou des vers de terre n’ont jamais été suivies de confirmation par les études scientifiques. En effet la protéine libérée par la PGM a une action très spécifique et reconnue vis à vis des insectes nuisibles ciblés contrairement aux insecticides de synthèse couramment utilisés.
Les biotechnologies, dont la transgénèse n’est qu’une des applications, font partie de la boite à outils du XXIème siècle pour développer une agriculture durable et donc répondant aux besoins de la société. Elles permettront aussi à l’agriculture de se libérer progressivement de sa dépendance d’une chimie de synthèse à base de produits pétroliers non renouvelables.
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