Laurent Chevallier, praticien attaché en centre hospitalo-universitaire, consultant nutrition et chef de l’unité de médecine environnementale de la clinique du Parc (Castelnau-le-Lez) et de nutrition à la maternité de la clinique Clémentville (Montpellier). Auteur de plusieurs livres à succès consacré à la nutrition, le Dr Chevallier sort aujourd’hui « Le livre antitoxique », aux éditions Fayard.
Vous sortez aujourd’hui un livre « Le livre antitoxique : alimentation, cosmétiques, maison », quels sont les produits les plus nocifs à éviter en priorité ?
Il faut limiter les contacts avec les perturbateurs endocriniens qu’on trouve dans l’alimentation ou les cosmétiques. Il faut par exemple éviter les parabènes : les E214 à E219. Il faut limiter l’exposition au triclosan, un biocide contenu dans des dentifrices et différents produits cosmétiques, qui est aussi un perturbateur endocrinien. Eviter pour les additifs, les produits alimentaires en contenant plus 3, même si tous ne sont pas à considérer de la même manière. Attention entre autres à ne pas être trop exposé à l’E320 également considéré comme un perturbateur endocrinien.
Il faut aussi faire attention aux poêles en préférant des matières neutres comme l’inox, en y mettant une goutte d’huile, plutôt que des revêtements anti-adhésifs qui peuvent s’altérer et larguer des composés divers. Il faut se méfier des emballages plastiques qui peuvent contenir du bisphénol A, on les repère en lisant le numéro 7 sur triangle de recyclage.
Vous conseillez de se méfier également des vêtements…
S’agissant des vêtements, il faut systématiquement laver deux fois les vêtements neufs, pour que certains produits comme les polybromés, considérés également comme des perturbateurs endocriniens, s’ils sont présents soient moins émissifs.
Il convient également d’éviter les pyjamas avec des inscriptions en plastique, qui contiennent souvent des phtalates qui peuvent imprégner dans la peau. C’est à proscrire surtout pour les jeunes enfants. Il faut également être vigilant sur les jouets. Il existe toute une série de mesures simples à prendre, je les hiérarchise dans ce livre.
Après le bisphénol A qui sera bientôt totalement interdit en 2015 dans les contenants alimentaires, quel est le polluant aujourd’hui autorisé qui vous semble le plus préoccupant aujourd’hui ?
Il faut surtout développer une « hygiène chimique » c’est-à-dire limiter l’exposition aux produits contenant des composés issus de la chimie de synthèse. Avec la révolution pasteurienne, on a développé une hygiène contre les micro-organismes : les bactéries et les virus et ça a marché ! L’hygiène a progressé par des mesures de prévention. On n’a pas éradiqué la peste ou le choléra par le soin mais par la prévention, il faut agir de même avec la chimie de synthèse.
L’organisme a tout de même heureusement les moyens de neutraliser un certain nombre de produits notamment par l’intermédiaire du foie, mais il ne faut pas qu’il soit « débordé ». Comme pour le système immunitaire, nous disposons d’un système de défense contre différents produits chimiques. La raison en est simple, des produits chimiques toxiques, on en trouve dans la nature, avec par exemple certains champignons vénéneux. Mais outre son système pour les neutraliser (chimiokines?), l’homme a appris dans son histoire à les éviter.
Avec la chimie de synthèse, il n’y a pas de facteurs gustatifs ou olfactifs discriminants pour les identifier et les éviter. Or, un grand nombre de maladies et de problèmes de santé comme l’infertilité, le diabète, l’obésité ou les cancers sont pour partie dépendants de facteurs environnementaux chimiques.
Bien au-delà de la nutrition, c’est l’ensemble de notre quotidien qui doit être repensé à vous écouter…
Oui et finalement très tôt car l’embryon est particulièrement vulnérable. Je conseille des femmes enceintes dans le cadre d’une maternité très impliquée dans le développement durable. Nous avons été parmi les premiers à Montpellier par exemple, à supprimer tous les phtalates des dispositifs médicaux des nouveaux-nés ou encore à retirer l’aspartame, inutile, des plateaux pour les femmes enceintes.
Une étude de l’Inserm a alerté sur le fait que les coiffeuses et les femmes de ménage qui sont en contact avec de nombreux produits chimiques, comme des composés organiques volatils, ont plus d’enfants souffrants de malformations que les autres femmes. Des recommandations spécifiques institutionnelles ont-elles été données ? Non, nous nous en donnons !
Nous nous inscrivons clairement dans la prévention et j’ai monté aussi une unité spéciale où nous prenons en charge des patients qui ont des problèmes de forte sensibilité à certains produits notamment chimiques. Les pouvoirs publics sont trop laxistes par rapport à ces problèmes. Il est urgent d’agir. Mais d’ores et déjà, individuellement, on peut prendre un certain de mesures pour éviter ces risques.
Comment fait-on au quotidien pour éviter ces polluants chimiques lorsqu’on est pas scientifique ? Donnez-vous les noms de produits et de marques à éviter ?
Non, je fais plutôt l’inverse. Je conseille des produits « positifs ». Sans être exhaustif, je suis plutôt dans une dynamique de proposer des solutions.
Existe-t-il toujours une alternative à ces produits chimiques ?
Pas toujours mais il existe un nombre impressionnant de produits totalement inutiles et néfastes selon le degré de fréquence de l’utilisation. Les lingettes pour nettoyer les fesses des nourrissons imprégnées de produits chimiques sont assez peu recommandables, elles ne sont pas utiles. On peut laver à l’eau et essuyer avec un linge propre, ou utiliser des produits comme le liniment oléocalcaire sans conservateur à base d’huile d’olive.
Et on peut aussi faire des économies. Beaucoup de produits d’entretien conventionnels très détergents ne sont bons ni pour la santé, ni pour la planète. On peut utiliser du bicarbonate de soude, du vinaigre blanc, etc? c’est un choix de santé et environnemental et en plus on s’y retrouve car c’est moins cher.
La démarche proposée est positive, avec exposé de façon très concrète, une multitude d’alternatives intéressantes aux produits conventionnels, ils sont de plus en plus aisés à trouver.
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