Des médecins français s’inquiètent du boom des prescriptions de Ritaline, un médicament destiné au enfants jugés hyperactifs. Si pour certains il s’agit d’une pilule miracle, pour d’autres, la Ritaline s’apparente à une substance stupéfiante, même si une étude américaine publiée hier récuse tout risque accru de toxicomanie future pour les enfants traités.
Calme-toi ! Assied-toi ! Tiens-toi tranquille ! Nombreux sont les parents qui se retrouvent parfois exaspérés par le comportement très actif de leur enfant. Mais, des médecins s’inquiètent aujourd’hui de voir les ventes de Ritaline croître régulièrement. Ce médicament destiné initialement à calmer les enfants diagnostiqués « hyperactifs » serait selon eux prescrit un peu trop facilement. Or, la Ritaline est une cousine des amphétamine, classée parmi les substances stupéfiantes. Selon les chiffres dévoilés par l’étude Celtipharma hier, ces cinq dernières années, les ventes de Ritaline ont progressé de 70%. Un chiffre inquiétant car derrière cette pilule miracle qui calme les enfants turbulents peut se cacher un médicament aux effets secondaires parfois violents.
« Kiddy coke » : la cocaïne des enfants
C’est indéniable, la Ritaline calme les enfants. Selon les médecins, une dizaine de comprimés suffisent à apaiser les enfants hyperactifs, qui retrouvent un sommeil harmonieux, une meilleure attention, notamment en classe. Mais attention, tous les enfants turbulents ne sont pas hyperactifs. « Le diagnostic de l’hyperactivité est souvent mal posé (…) Cette hyperactivité ne renvoie pas forcément à une anomalie biologique qui nécessiterait ce traitement. Elle peut renvoyer à un contexte d’anxiété de dépression. Il faut soigner ce contexte avant de se précipiter à donner un traitement », explique le Pr Maurice Corcos, spécialiste de l’adolescent à l’institut mutualiste Montsouris.
D’autant que comme tout médicament, la Ritaline génère certains effets secondaires pouvant parfois se révéler dangereux. Interrogé par Europe 1, ce spécialiste explique que « c’est une substance de type stupéfiant. Est-ce que ça soigne? Non« . Les anglo-saxons surnomment d’ailleurs cette Ritaline « kiddy coke », la cocaïne des enfants. On la soupçonne d’avoir des effets sur la croissance des adolescents, qui pourrait se trouver ralentie par la prise de ce médicament. Des risques cardio-vasculaires, neurologiques et psychiatriques sont également évoqués. Dans un avis du 3 octobre 2012, la Haute autorité de santé s’inquiète également « des incertitudes qui demeurent sur les effets à moyen et long terme ». Elle met alors en garde contre un « risque d’usage détourné, de mésusage ou d’abus ».
Ni plus, ni moins de risques
En revanche, tandis que des chercheurs américains évoquaient par ailleurs que les enfants hyperactifs avaient une propension plus importante à recourir aux drogues, à l’alcool ou encore au tabac en grandissant, une étude publiée hier dans la revue JAMA Psychiatry, réfute ce constat. Kathryn Humphreys, psychologue à l’Université de Californie et principal auteur de cette recherche explique « nous avons constaté que les enfants prenant des médicaments ne présentaient pas plus de risques ou moins de risques de devenir alcooliques ou dépendants de drogues parce qu’ils étaient traités avec ces stimulants (…) Nous n’avons trouvé aucun lien entre l’utilisation de médicaments comme la Ritaline et de futurs abus d’alcool, de tabac, de marijuana ou de cocaïne« .
En revanche, « au moins deux tiers des enfants atteints du trouble du déficit d’attention ont de sérieux problèmes scolaires, ou pour socialiser, et souffrent souvent d’anxiété et de dépression dans leur adolescence« , précise Steve Lee, professeur adjoint de psychologie à l’Université de Californie.
Commentaires récents