Un chercheur canadien vient de tirer le signal d’alarme : les balises GPS installées par des scientifiques sur des animaux permettent à des personnes mal intentionnées d’intercepter les données et suivre à la trace ces animaux – avec des conséquences qui pourraient être dramatiques.
Scientifiques et biologistes installent depuis des années des balises GPS sur des animaux, parfois protégés, pour des raisons tout à fait légitimes. Ces balises permettent en effet d’étudier les déplacements et habitudes des animaux et ainsi améliorer notre connaissance d’une espèce ; pour les espèces protégées, notamment celles en voie d’extinction, les balises servent à retrouver les derniers individus d’une espèce, vérifier s’ils sont en bonne santé ou s’ils se reproduisent bien.
Mais ces balises induisent également des effets pervers, qui viennent d’être analysé par Steven Cooke, un biologiste à l’université Carleton d’Ottawa (États-Unis) dans la revue Conservation Biology du 20 février 2017. Le premier est que la pose et le relevé de ces balises habituent des animaux sauvages à un contact avec l’homme, ce qui peut modifier leur comportement – et notamment les rendre plus vulnérables à des braconniers. Si pour les espèces proches de l’extinction, un suivi de ce type peut sembler indispensable, pour les autres, Cooke recommande de trouver d’autres méthodes d’étude.
Photographes et agences de voyage pistent des animaux
Mais le plus problématique dans l’utilisation de ces balises, c’est que les signaux qu’elles envoient ne sont pas cryptés, ou mal. Steven Cooke dénonce ce qu’il appelle le « cyberbraconnage », une interception des données de ces balises à des buts autres que scientifiques. Et les personnes intéressées à suivre à la trace un animal sont nombreuses, plus ou moins bien intentionnées.
Cooke raconte comment le parc national de Banff, en Alberta, dans l’Ouest canadien, a dû interdire l’utilisation de terminaux radio après avoir découvert que des photographes se servaient d’outils télémétriques pour traquer des ours ou des caribous. Une société organisant des safaris en Afrique utilisait le même procédé pour conduire ses touristes directement vers des animaux précis plutôt que des les attendre – garantissant des ristournes si tel ou tel animal n’avait pas été vu pendant le séjour.
Des attaques guidées par les balises scientifiques
Des cas encore plus graves sont avérés, comme des fermiers qui gênent par ce biais la réintroduction des loups dans le parc du Yellowstone, ou des plongeurs aux Bahamas surpris à retirer les balises à des requins – et il est peu probable que ce soit pour le bien de l’animal. Mais le plus inquiétant est bien ce qu’un tel piratage peut occasionner : s’il est si facile de repérer et de suivre à la trace des espèces protégées, il semble évident que des braconniers en ont déjà profité pour retrouver des animaux et les chasser.
Steven Cooke recommande en réponse un cryptage des données, pour en limiter l’utilisation aux seuls scientifiques ayant installés la balise. Mais il craint que ce soit difficile à imposer, notamment parce que les chercheurs sont souvent contraints de publier leurs données par ceux qui les financent.
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