Le think tank Terra Nova invite les Français à amorcer une révolution dans leurs assiettes en divisant par deux leur consommation de viande d’ici 20 ans.
Dans son rapport « La viande au menu de la transition alimentaire », publié jeudi 23 novembre le think tank Terra Nova orienté à gauche plaide en faveur « d’un nouvel équilibre entre nos traditions alimentaires, nos exigences sanitaires, nos impératifs environnementaux et nos intérêts économiques ».
Il s’agirait d’atteindre en France, dans les vingt années à venir, un régime alimentaire qui soit composé de deux tiers de protéines végétales et d’un tiers d’animales, en divisant par deux nos consommations de viande et de poisson. Aujourd’hui, c’est le chiffre inverse qui est constaté.
Les chercheurs font part de 11 recommandations qui permettraient de changer la culture de la viande reine dans les assiettes des Français. Paris celles ci on retrouve la nécessité de mieux former les cuisiniers, d’étiqueter les produits de manière à indiquer le mode d’élevage et d’abattage des animaux, mais aussi d’imposer un repas végétarien par semaine dans les cantines des collèges et des lycées.
« Il nous semblerait pertinent d’évoluer, dans les restaurants scolaires, vers la généralisation du repas alternatif végétarien comme option proposée aux parents pour leurs enfants, et vers l’imposition d’un jour végétarien par semaine, dans les collèges et lycées », indique le rapport. Une proposition qui permettrait aussi, selon Terra Nova, « de réallouer les sommes économisées à la montée en gamme globale de l’offre de restauration en privilégiant, entre autres, la viande de qualité ou les produits bio pour les autres repas ».
Un argumentaire qui se veut une « contribution au débat » sur une « question de société et de politique majeure », avant que ne s’achèvent, fin novembre, les Etats généraux de l’alimentation mis en oeuvre par Emmanuel Macron.
Une consommation qui n’est plus soutenable
« L’essentiel est de montrer que ce changement n’est pas une punition mais un futur désirable et nécessaire » préconise Thierry Pech, le directeur général de Terra Nova, coauteur du rapport.
Et en effet, il y a urgence. Les niveaux de production et de consommation de viande « ne sont plus soutenables tant au plan sanitaire qu’au plan écologique », rappelle le rapport. La consommation de viande a explosé partout dans le reste du monde, tirée par la démographie, l’amélioration des niveaux de vie et l’industrialisation de l’élevage. Aujourd’hui, ce sont plus de 60 milliards d’animaux terrestres et 1 000 milliards de poissons qui sont abattus chaque année afin de satisfaire nos besoins toujours croissants. En découlent des conséquences néfastes pour l’environnement : l’élevage mobilise un tiers de terres cultivables de la planète, génère 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre, contribue à la déforestation et consomme beaucoup d’eau ainsi que d’engrais azotés, qui entraînent des pollutions aux nitrates.
Et la situation ne fera qu’empirer puisque la production mondiale de viande devrait augmenter de 75 % d’ici à 2050 pour contenter l’appétit de presque 10 milliards d’humains.
Un régime meilleur pour la santé
La multiplication des scandales sanitaires, la meilleure connaissance des risques pour la santé d’une consommation excessive de viande, l’empreinte écologique de l’élevage ou la montée de la sensibilité à la souffrance animale ébranlent toujours davantage une filière déjà fragilisée par la crise, par des coûts de production élevés et par une concurrence accrue avec l’étranger. Un mouvement de « déconsommation » est d’ores et déjà à l’œuvre depuis une dizaine d’années.
Selon Terra Nova, la solution pour répondre à ces défis est un régime alimentaire moins carné, basé sur deux tiers de protéines végétales. Une telle conversion « n’est ni absurde ni inaccessible », avancent les auteurs..
Cette révolution serait bénéfique pour la planète. « Elle permettrait en effet de diminuer de moitié les émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture d’ici à 2050 par rapport à 1990, conformément à la loi de transition énergétique », avancent les auteurs, en limitant les surfaces agricoles, la déforestation, et les rejets directs de méthane ou d’autres polluants.
Elle s’avérerait également favorable pour la santé, tout en couvrant nos besoins en protéines au-delà du nécessaire (0,8 g par jour et par kilo de poids corporel, contre 1,4 g/kg/j aujourd’hui). A l’inverse, consommer plus de 500 g de viande rouge ou 150 g de charcuterie par semaine augmente le risque de cancer colorectal.
« Une telle évolution est pourtant loin d’être acquise, prévient Terra Nova. Les habitudes alimentaires d’une population ne se modifient pas en quelques années et il faut veiller à ne pas sombrer dans une sorte de positivisme alimentaire qui ferait fi de la culture, des normes sociales, des traditions et du plaisir. »
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