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Neutralité carbone dans la production électrique : quelle trajectoire pour la France ?

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Le dernier rapport du GIEC a réitéré l’importance de la « neutralité carbone » en 2050. Cet équilibre entre, d’un côté, quantité d’émissions de gaz à effet de serre et, de l’autre, capacité de la planète à stocker le dioxyde de carbone émis, passe nécessairement par une production électrique décarbonée, ce qui est le cas à 97 % en France.

Le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), rendu lundi 8 octobre 2018, a le mérite de la clarté. Ce qu’il dit, en substance ? Si nous voulons préserver – ou, du moins, ne pas abîmer davantage – la planète, qui connait depuis l’ère industrielle une hausse des températures globales d’1 degré Celsius, nous avons intérêt à clore les beaux discours et passer aux actes. Car si les scientifiques ont quelques infimes doutes, aujourd’hui, sur la valeur qu’atteindra le mercure dans une quinzaine d’années – les estimations vont de + 1,5 °C à + 2 °C –, une chose est sûre, selon eux : chaque degré avalé, sur le thermomètre mondial, est une catastrophe. Hausse du niveau des mers, qui affecterait plusieurs millions de personnes, croissance exponentielle des jours chauds par an, risques accrus, dans certaines régions du globe, de pénuries alimentaires et que les systèmes de santé se détériorent ; les conséquences du réchauffement climatique sont connues. Les solutions également.

Assumant parfaitement son nouveau titre de champion de la planète, le président français, Emmanuel Macron, a ainsi déclaré sur Twitter, en début de semaine : « Le rapport du #GIEC le prouve scientifiquement : nous avons toutes les cartes en main pour lutter contre le réchauffement climatique. Mais il faut que tout le monde agisse maintenant ! ». Difficile de lui donner tort, même s’il y a dans cette déclaration comme un air de déjà vu, qui traduit l’inertie ambiante, à l’échelle de la planète, lorsqu’il s’agit de combattre le réchauffement climatique. Difficile, également, de blâmer la France, l’un des bons élèves mondiaux en matière de diminution des gaz à effet de serre (GES), premiers responsables de la hausse des températures. Mais comme le reconnaissait dans la foulée Brune Poirson, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire : « On peut encore faire beaucoup ».

Bilan contrasté pour les énergies renouvelables

Alors que l’Hexagone s’est engagé, comme la quasi totalité des pays, dans un processus de « décarbonation » de son économie, c’est dans le secteur énergétique – l’un des premiers émetteurs de GES, avec le transport et l’industrie par exemple – qu’il convient d’agir en priorité. « Le rapport du GIEC de ce jour montre combien la maîtrise de la demande énergétique et l’utilisation d’énergies décarbonées sont essentielles pour le proche avenir de nos enfants et de notre planète », a déclaré, il y a quelques jours sur LinkedIn, Olivier Lamarre, directeur adjoint de la production nucléaire d’EDF. Le géant tricolore, premier producteur d’électricité à base d’atomes en Europe, veut voir dans les études alarmantes sur l’avenir du climat mondial, la confirmation que sa stratégie – basée à la fois sur le développement du nucléaire et des énergies renouvelables, deux sources dites « décarbonées », n’émettant pas ou très peu de GES –, est la bonne.

Problème, le bilan des énergies vertes est « très contrasté », comme le reconnaissait en juin dernier le média spécialisé Enviro2b.com « L’éolien terrestre a souffert jusqu’à présent d’un problème d’acceptabilité locale [quand] l’éolien offshore est en souffrance ». Quant au photovoltaïque, il « a connu lui aussi un retard important [même s’il] est de nouveau soutenu par les pouvoirs publics au travers de nombreux appels d’offres ». Pas de quoi réaliser les objectifs fixés par la nouvelle politique énergétique de la France, à savoir : 32 % de renouvelables dans la consommation finale d’énergie en 2030 – nous n’en sommes qu’à 15 % actuellement, soit moins de la moitié. Même « la cible de 23 % en 2020 ne sera pas atteinte » a confié Jean-Louis Bal, le président du Syndicat des énergies renouvelables. Seule source de satisfaction : le chef de l’Etat a réaffirmé, mi-septembre, son engagement quant à la fermeture de toutes les centrales à charbon.

Le nucléaire est « un atout important »

Un bon point, mais largement insuffisant pour assurer la « neutralité carbone de la production d’électricité à l’horizon 2050 » comme s’y est engagé le gouvernement. Qui devra donc jouer sur le curseur du nucléaire. Source propre d’énergie, malgré tout fiable et peu coûteuse, quoi qu’en disent ses détracteurs, l’atome fait partie intégrante du modèle énergétique français des prochaines décennies ; « un atout important qu’il ne faut pas balayer d’un revers de la main » pour Brice Lalonde, ancien ministre de l’Environnement sous François Mitterrand. Alors que le dernier rapport du GIEC propose des scénarios avec une augmentation du nucléaire de 60 % sur 10 ans, comme le rappelle Nicolas Mounier, ingénieur chez EDF, la France s’est engagée, via la loi de transition énergétique adoptée en 2015, dans la diminution de l’atome. Beaucoup estiment qu’afin de diminuer les émissions de GES – objectif ultime de la politique climatique du gouvernement – tout en maintenant un certain niveau de consommation énergétique, la France devra néanmoins freiner la fermeture de ses centrales.

Il apparaît effectivement que l’objectif inscrit dans la loi – de 75 % à 50 % d’électricité nucléaire d’ici 2050 – ne peut être réalisé, en attendant le développement des technologies liées aux renouvelables, sans recours aux énergies fossiles. Ce qui rentrerait en parfaite contradiction avec les engagements nationaux et internationaux de Paris. Nicolas Hulot, déjà, lorsqu’il était au gouvernement, avait dû revoir sa copie en matière d’atome, reconnaissant qu’il serait difficile d’atteindre les 50 % figurant dans la loi. D’ici la fin du mois d’octobre, le gouvernement devrait d’ailleurs rendre sa Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour les périodes 2019-2023 et 2024-2028, sorte de feuille de route pour la politique énergétique française. Et il se pourrait que la part belle soit faite au nucléaire et à l’électricité, au détriment d’autres sources moins consensuelles, comme le gaz.

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