La star de cette semaine c’est elle : la canicule. Elle occupe le terrain médiatique, alimente les déclarations rassurantes des responsables politiques et les indications pratiques des pouvoirs publics. À Paris et dans les grandes villes françaises, c’est la panique : comment gérer une telle vague de chaleur, phénomène qui risque de se multiplier dans les années à venir avec le changement climatique ? Une solution simple existe pourtant : la végétalisation. Exemple à Strasbourg avec la canopée ou dans la banlieue parisienne avec Europacity.
L’été sera chaud. Météo France prévoit « a minima six jours de canicule », cette semaine jusqu’à vendredi. L’organisme de météorologie annonce des valeurs comprises entre 35 °C et 40 °C sur une grande partie du pays, à l’exception de la Bretagne. On n’hésite plus à parler d’un épisode exceptionnel : « Cette canicule s’annonce sans précédent pour un mois de juin. Depuis 1947, seule la vague de chaleur du 18 au 28 juin 2005 avait été aussi précoce. L’épisode attendu s’annonce bien plus intense », annonce Météo France.
Hélas, les épisodes de ce type pourraient être de moins en moins rares. Selon Jean Jouzel, climatologue et vice-président du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), les épisodes caniculaires devraient se multiplier et s’intensifier dans les années à venir : « Quand on regarde les températures en France, elles ne dépassent pas actuellement les 42-49 degrés. Dans un contexte de réchauffement climatique, dans la deuxième partie du siècle, on pourrait craindre des températures record de l’ordre de 50 degrés, voire 55 degrés sur l’Est de la France. On passe dans un autre monde », a expliqué l’expert à 20 Minutes.
Selon les prévisions de Météo France, la capitale française devrait pour sa part connaître des pics de température de 55 °C à l’ombre d’ici à 2050. Alors que sa température moyenne devrait augmenter de 2 à 4 °C dans les prochaines années, Paris pourrait connaître entre 10 et 26 alertes à la canicule par an d’ici à la fin du siècle. Des hypothèses plus que vraisemblables lorsqu’on sait que pendant l’été 2018, le thermomètre est grimpé à 65 °C au sol rue du Louvre, comme le rappelle Le Monde.
Canopée strasbourgeoise
De façon probablement tardive, les autorités commencent à prendre conscience de l’ampleur du phénomène. Ainsi, l’Eurométropole de Strasbourg mise sur la végétalisation afin de lutter contre la chaleur et la pollution. « Notre objectif est de créer une canopée à l’échelle de la ville », s’enthousiasme Christel Kohler, en charge de la nature en ville.
Comme le souligne Amandine Crambes, ingénieur urbaniste à l’Ademe (Agence pour l’environnement et la maîtrise de l’énergie), la végétalisation est en effet « une des meilleures solutions pour rafraîchir la ville, grâce à l’évapotranspiration des arbres. Quand un arbre respire par les feuilles, il évapore de l’eau et cette eau rafraîchit l’air. Un arbre mature peut évaporer jusqu’à 450 litres d’eau, c’est l’équivalent de cinq climatiseurs qui tourneraient pendant 20 heures », explique l’experte.
S’agit-il de la solution miracle contre ces vagues de chaleur qui, rappelons-le, peuvent faire des milliers de morts ?
La question est en réalité plus complexe. Car « réduire les surfaces minérales, où la chaleur se réfléchit comme un miroir, n’est pas possible partout. Il y a les réseaux souterrains, les canalisations et même des parkings qui empêchent par endroits une végétalisation conséquente », regrettent les autorités strasbourgeoises. Anne Ruas, géographe et chercheuse à l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux, regrette de son côté que nos villes ne soient « pas du tout pensées pour faire face aux grosses chaleurs. Une ville comme Paris a très peu de volets, pas de terrasses, pas de patio, comme c’est le cas dans les villes du Sud. Il est très difficile de rectifier le design et les usages d’une ville ».
EuropaCity : 17 hectares d’espaces verts aux portes de Paris
Les collectivités s’échinent ainsi à trouver des espaces végétalisables, une tâche bien plus ardue qu’on ne l’imagine. Mais pas impossible. Dans le Val-d’Oise, l’écoquartier EuropaCity prévoit la création de 17 hectares d’espaces verts sur les 80 hectares du projet. Celui-ci devrait en effet accueillir un parc arboré de dix hectares et une ferme urbaine de sept. EuropaCity, qui vise la neutralité carbone, aura en outre recours à 100 % d’énergie renouvelable. L’intégralité des besoins en chaleur seront produits sur place grâce à une chaufferie biomasse et à la géothermie. La ferme urbaine permettra quant à elle d’approvisionner les restaurants en circuits courts et les bâtiments accueilleront la plus grande installation photovoltaïque en toiture de France (14 ha).
Toujours dans le Val d’Oise, à quelques kilomètres du futur Europacity, une gigantesque forêt pourrait voir le jour dans les prochaines années : plusieurs élus locaux réclament la plantation de près d’un million d’arbres dans la plaine de Pierrelaye-Bessancourt près de Pontoise. Un espace vert plus grand que le bois de Boulogne, qui jouxterait aussi la capitale et permettrait de la rafraîchir lors des pics de chaleur.
Mais s’il est difficile de trouver des espaces aussi vastes dans Paris intra-muros, Anne Hidalgo ne désespère pas de voir la nature retrouver « ses droits à Paris à travers l’agriculture urbaine des toits et des façades, mais aussi dans les rues et les places », comme elle l’a affirmé récemment dans Le Parisien. L’édile a annoncé la création de forêts urbaines sur « quatre grands sites emblématiques » : le parvis de l’Hôtel de Ville, l’esplanade nord de la gare de Lyon, l’arrière du Palais Garnier et la voie des berges de Seine piétonne située rive droite. Par « forêt urbaine » il faut entendre des plantations d’arbres, ou du moins d’arbustes et de la pelouse. Certes, c’est modeste, mais toutes les collectivités ne disposent pas, hélas, de 280 hectares aménageables pour booster l’emploi, l’économie et la protection de l’environnement, comme c’est le cas pour le Triangle de Gonesse.
La végétalisation de l’espace urbain est donc la solution idoine pour répondre au défi des fortes chaleurs. Mais dans le cadre de villes densément construites comme Paris, il faudra s’armer de patience et miser sur les aménagements prévus autour de la capitale dans le cadre du grand Paris.
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