Alors que le bâtiment est le deuxième secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre, en France, la RE 2020 doit venir remplacer la RT 2012, courant 2020, pour encadrer davantage les constructions neuves.
Il y a tout juste un an, le Groupement d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) réaffirmait dans un rapport spécial la nécessité d’atteindre la « neutralité carbone » en 2050 afin de limiter le réchauffement planétaire à +1,5 °C. En cohérence avec ces objectifs, la France s’est engagée, dans sa « Stratégie nationale bas-carbone » (SNBC), à diviser par 8 ses émissions de gaz à effet de serre (GES), directement responsables du dérèglement climatique, tout en parvenant à la neutralité carbone à l’horizon 2050. Celle-ci est primordiale pour la biodiversité ; elle représente l’état d’équilibre entre les émissions de GES d’origine humaine et leur retrait de l’atmosphère par l’homme ou de son fait. La différence entre les gaz émis et extraits – on parle surtout du CO2, l’un des gaz les plus polluants – étant alors égale à 0.
En France, un secteur, en particulier, peut jouer un rôle important dans la diminution des émissions carbonées : celui du bâtiment, « le deuxième secteur le plus émetteur […] derrière le transport si l’on considère les émissions liées à la consommation d’énergie uniquement », précise l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) dans un rapport remis en juin 2019. En effet, « le secteur présente une forte dépendance aux énergies fossiles. Si l’on ajoute à ces émissions celles évaluées sur le cycle de vie des produits de construction et équipements mis en œuvre dans les opérations de construction neuve et de rénovation », les émissions du secteur représentent jusqu’à un tiers des émissions nationales, comme l’indique d’ailleurs la SNBC.
« Très dépendant des énergies fossiles »
« Le secteur [du bâtiment] représente donc un vrai enjeu pour la France au regard de ses ambitions climatiques », conclut le rapport. D’autant que « La France considère que le secteur du bâtiment (au sens des consommations énergétiques du secteur) a un très gros potentiel de décarbonation. » précise Julie Daunay, manageuse chez Carbone 4, un cabinet de conseil spécialisé dans l’adaptation au changement climatique. Comment les acteurs du secteur peuvent donc s’inscrire dans une démarche « zéro émission nette » ? – pour reprendre le questionnement de l’ADEME – . Selon l’agence, le chantier principal à mener est celui de la rénovation du parc bâtimentaire existant – la SNBC évoquant d’ailleurs explicitement ce levier. « La décarbonation du secteur devra passer par une rénovation massive du parc pour atteindre une performance 100 % BBC [bâtiment basse consommation] » d’ici 2050, estime l’agence. Ce qui implique un rythme de rénovation « très soutenu » selon elle, que ce soit dans le résidentiel ou le secteur tertiaire.
Depuis 2018, le gouvernement exige également que les constructions neuves prennent en compte les émissions de GES dans la définition de leur performance énergétique. A l’état d’expérimentation pour l’instant, les futurs seuils réglementaires sont en cours de concertation, mais l’objectif final est bien d’inciter les acteurs à concevoir des bâtiments à faible impact carbone, évalué globalement sur le cycle de vie (extraction des matières premières, fabrication des produits et équipements de construction, construction, exploitation, déconstruction et fin de vie des produits et équipements). Une sorte de vaste chantier à l’intérieur du chantier, obligatoire cependant si l’on souhaite diminuer l’empreinte carbone des bâtiments.
La raison est simple : le secteur bâtimentaire, en France, « est encore très dépendant des énergies fossiles, pour le chauffage notamment, rappelait il y a quelques jours Julie Daunay. On sait techniquement réduire les consommations d’énergie et alimenter les besoins restants avec des énergies bas carbone, c’est pour cela que la France, dans sa SNBC, attend du secteur [bâtimentaire] une décarbonation ‘‘quasi-complète’’ ». Par exemple, indique l’ADEME, pour la seule phase d’exploitation d’un bâtiment neuf, les niveaux de performance énergétique et carbone visés sont respectivement 20 kWh/m2 et 0 kgCO2/m2 en 2050.
La place de l’électricité dans la RE 2020
La France, qui affiche selon les Nations unies (ONU) « le deuxième plus important investissement annuel dans l’efficacité énergétique des bâtiments en Europe », peut néanmoins faire davantage. De nombreux espoirs se portent sur la future Réglementation environnementale 2020 (RE 2020), qui remplacera en 2020 la Réglementation thermique 2012 (RT 2012), et doit encadrer la construction des bâtiments en faisant respecter des critères éco-responsables strictes. « N’oublions pas qu’un bâtiment qui sort de terre avec une mauvaise empreinte carbone sur la phase d’exploitation embarque ses émissions sur 50 ans au moins », avertit Julie Daunay.
L’un des sujets les plus discutés, dans le cadre de la RE 2020, et qui aura un impact décisif sur l’empreinte carbone des bâtiments, est celui de la place de l’électricité pour le chauffage des constructions neuves, aujourd’hui fortement consommatrices de gaz. Alors que la première énergie, principalement issue des énergies renouvelables et du nucléaire, est très faiblement émettrice de CO2, il n’en va pas de même pour la seconde. Dès lors, il conviendrait pour beaucoup de rééquilibrer la balance en favorisant fortement l’électricité au dépens du gaz, dans la RE 2020,. Attention cependant, cela ne signifie pas le retour de radiateurs électriques de mauvaise qualité. « Clairement, c’est un peu plus d’électricité d’un côté par les pompes à chaleur mais pas le retour du radiateur grille-pain », relativise Laurent Michel, le directeur général de l’énergie et du climat (DGEC). « On ne vise pas 100% de radiateurs à effet Joule dans les bâtiments en 2030, on vise un mix de solutions » souligne-t-il.
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