Un cinquième des importations de soja de l’UE en provenance du Brésil pourrait provenir de terres déboisées illégalement, selon une étude publiée le 16 juillet et qui propose un inventaire détaillé des exploitations de la chaîne d’approvisionnement.
Cette recherche, publiée le 15 juillet dans la revue Science, ouvre la porte aux entreprises internationales et aux forces de l’ordre brésiliennes qui peuvent dorénavant identifier les fermes violant les règles contre la déforestation amazonienne, selon le co-auteur de l’étude Raoni Rajao, spécialisé dans la gestion de l’environnement à l’Université fédérale de Minas Gerais.
Des recherches antérieures avaient retracé les ventes uniquement dans les municipalités où la déforestation illégale avait eu lieu.
« Le Brésil a les moyens de développer un excellent système de surveillance dirigé par le gouvernement qui est capable de mettre fin aux chaînes d’approvisionnement issues de la déforestation », a déclaré Raoni Rajao. « Avant, les moyens techniques n’existaient pas, mais ce n’est plus le cas. »
Premier exportateur mondial de soja d’ici 2029
Développer les systèmes de surveillance est particulièrement important, selon l’étude, car le pays cherche à « nourrir le monde ». Le Brésil, qui produit désormais un volume de soja similaire à celui des États-Unis, est en passe de devenir de loin le premier exportateur mondial de soja d’ici 2029, selon un rapport publié par l’OCDE et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture.
Dans leur étude, Raoni Rajao et d’autres chercheurs ont étudié la déforestation en Amazonie brésilienne et dans la savane limitrophe de Cerrado depuis 2008.
L’équipe a également constaté que 17% des exportations de bœuf du Brésil vers l’Union européenne sont liées à la déforestation. Cependant, il n’y avait que quelques « pommes pourries » dans les chaînes d’approvisionnement du soja et du bœuf, avec « seulement » 2% des exploitations qui provoquaient 62% de la déforestation illégale dans la zone couverte, selon le rapport.
L’étude n’a pas nommé les entreprises ou les exploitations impliquées dans la déforestation.
Une politique brésilienne qui incite à la déforestation
L’équipe n’a étudié que les exportations brésiliennes vers l’Union européenne, qui ont absorbé 16% des exportations de soja et de farine de soja du Brésil en 2019. Raoni Rajao a déclaré que les chercheurs se sont concentrés sur l’UE en partie à cause d’un récent accord commercial entre l’UE et le bloc sud-américain Mercosur. Ce dernier devrait voir augmenter le commerce agricole bilatéral.
Raoni Rajao a déclaré que les recherches futures pourraient porter sur les exportations vers la Chine, qui représente 64% des ventes de soja et de farine.
« Cette constatation survient au moment critique où le gouvernement brésilien subit des pressions pour inverser sa position notoirement anti-environnementale qui alimente la déforestation d’Amazonie », a déclaré Philip Fearnside, écologiste à l’Institut national de recherche amazonienne du Brésil, non impliqué dans la recherche.
La déforestation a explosé en Amazonie brésilienne depuis que le président Jair Bolsonaro a pris ses fonctions en 2019 et a affaibli l’application de la loi environnementale tout en exhortant à l’agriculture et à l’exploitation minières à des fins commerciales dans les zones forestières.
La déforestation en Amazonie brésilienne a atteint un pic jamais atteint en 11 ans en 2019, détruisant une zone de la taille du Liban, selon les données du gouvernement. Les défrichements ont encore augmenté de 25% au cours des six premiers mois de 2020, par rapport à il y a un an, selon des données préliminaires.
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