Confronté à la montée des préoccupations environnementales, le secteur du luxe multiplie les initiatives pour la défense du climat et des ressources naturelles. Dernier exemple en date: l’engagement de LVMH d’atteindre la neutralité biodiversité à horizon 2030.
Quand la maison brûle, s’il est un secteur qui ne veut pas être accusé de regarder ailleurs, c’est bien celui du luxe. La COP21, qui s’est tenue en France en 2015, a marqué une étape déterminante dans l’adoption d’engagements auxquels ont souscrit nombre d’entreprises en vue. Ainsi, dans les années qui ont suivi, Chanel annonçait vouloir réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 50 % d’ici 2030, Kering promettait d’atteindre la neutralité carbone en 2050, et Bernard Arnault tablait sur une réduction de 25 % de ses émissions de CO2 dès 2020.
Mais la prise de conscience remonte en réalité plus tôt. En 1992, à la suite du Sommet de Rio, LVMH créait une direction du développement durable qui n’a cessé de voir son rôle renforcé dans les processus de conception et de commercialisation au sein du groupe.
LVMH : des paroles aux actes
Devant ce qui ressemble à une accélération, on pourrait être tenté de faire la fine bouche. Et si tout ceci n’était qu’une vaste opération de communication à la hauteur des moyens immenses dont disposent les entreprises phares du luxe ?
Pas si simple. Car la crise environnementale majeure qui commence à peine à produire ses effets fait peser un risque ontologique sur la filiale. Qu’elles soient d’extraction animale ou d’origine végétale (étoffes, vins et spiritueux), les ressources qui servent de matière première aux produits créés et vendus sous l’étiquette du luxe ne sont pas extensibles à l’infini. Bien au contraire. La question est d’autant plus prégnante que le luxe entretient un rapport étroit avec la notion de rareté. La promesse du luxe étant de jouir de produits rares et de moments privilégiés dans un cadre idyllique. Que devient cette promesse quand les ressources qui servent à la satisfaire sont menacées de disparition ?
Sans compter les changements impulsés par les consommateurs eux-mêmes. Les nouvelles générations sont bien plus sensibles à ces sujets que leurs devancières. « On est arrivé à un point de bascule où la minorité active embarque la majorité financière », explique Elisabeth Laville, fondatrice du cabinet Utopies.
La neutralité biodiversité, nouvelle frontière du luxe
La crise du Covid marque une nouvelle étape dans cette prise de conscience planétaire. L’exploitation des forêts et le passage des agents pathogènes entre animaux et humains ont été identifiés comme une source probable de la pandémie. Le phénomène risque de se reproduire dans les décennies à venir si rien n’est fait pour y remédier. Face à la multiplication des risques environnementaux systémiques, l’heure n’est plus seulement à la lutte contre le réchauffement climatique, mais à des actions plus englobantes.
On connaissait la neutralité carbone, cet engagement à compenser les émissions de carbone par la reforestation et l’usage croissant d’énergies alternatives. Voici qu’émerge chez les acteurs du luxe le principe de neutralité biodiversité. Ainsi, à l’occasion du colloque international sur la biodiversité qui se tient ce mercredi à l’Unesco, Antoine Arnault a-t-il présenté cette ambition comme le nouvel horizon de LVMH à échéance 2030.
Concrètement, cela implique de réduire l’impact des activités du groupe sur les écosystèmes à travers une multiplicité d’actions : programmes contre la désertification et la déforestation, recours massif à l’agriculture régénératrice, initiatives en faveur du bien-être animal. Stella McCartney, l’une des stylistes maison ayant depuis longtemps renoncé à utiliser la moindre matière d’origine animale dans ses créations.
L’UNESCO défend le rôle des entreprises modèles
Ce n’est pas la première fois que LVMH s’engage aux côtés de l’UNESCO. En 2019 déjà, le groupe de Bernard Arnault signait avec l’institution onusienne un partenariat de cinq ans centré sur le programme « L’homme et la biosphère ». L’initiative a permis aux marques du groupe de recevoir l’appui de scientifiques pour adopter les procédures les plus respectueuses de l’environnement et des ressources.
Anticipant les procès en greenwashing, Audrey Azoulay, directrice générale de l’Unesco, assume le partenariat noué entre son institution et le leader français du luxe. « Il est crucial que des grands groupes privés s’engagent sur ce sujet, car ils ont un rôle majeur et un effet d’entraînement ». Au-delà de cette fonction d’exemplarité, l’organisation entend s’appuyer sur les initiatives du privé pour définir des indicateurs de mesure et de suivi dans un domaine, la biodiversité, où les choses sont moins avancées que pour le climat. A ce titre, les recherches financées par LVMH autour de « l’empreinte biodiversité » pourraient accélérer l’adoption de bonnes pratiques pour l’ensemble des acteurs économiques.
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