La pollution des ressources en eau en France a pris un tournant alarmant avec la révélation que plus de la moitié de la population pourrait consommer une eau potable contaminée par un polluant connu sous le nom d’acide trifluoroacétique (TFA), issu de la dégradation d’un pesticide largement utilisé. Selon un rapport récent du Monde, ce contaminant, classé parmi les « polluants éternels » en raison de sa persistance dans l’environnement et dans le corps humain, dépasse les normes de qualité de l’eau potable, exposant ainsi la population à des risques sanitaires considérables.
Le TFA provient de la dégradation du flufénacet, un herbicide utilisé dans le traitement des cultures de céréales. Bien que son utilisation en France ne soit pas encore réglementée, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a récemment reconnu le flufénacet comme perturbateur endocrinien. Cela signifie que les autorités françaises pourraient bientôt être amenées à considérer le TFA comme une substance « pertinente » pour l’eau potable, c’est-à-dire potentiellement dangereuse pour la santé publique.
Un pesticide en attente d’interdiction
L’usage du flufénacet est actuellement sous surveillance en Europe, et son autorisation a été prolongée à plusieurs reprises depuis son expiration en 2013. Toutefois, l’EFSA a jugé, en septembre dernier, que le flufénacet devait être réévalué à la lumière de nouvelles données scientifiques. Ce processus pourrait ouvrir la voie à son interdiction à l’échelle européenne dans les mois à venir, en particulier à la lumière des préoccupations croissantes concernant la contamination des nappes phréatiques.
Les résultats de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) suggèrent que la concentration en TFA dans l’eau dépasse largement les seuils autorisés, pouvant atteindre jusqu’à 10 µg/L, soit cent fois plus que la limite recommandée de 0,1 µg/L. Un échantillon d’eau prélevé à Paris a montré des concentrations supérieures à 2 µg/L, ce qui est préoccupant, d’autant plus que cet échantillon alimentait plus d’un tiers de la capitale.
Les ONG en appel à l’action
Face à ces révélations, plusieurs organisations environnementales, dont Pesticide Action Network (PAN) Europe, demandent une interdiction immédiate du flufénacet. L’ONG met en avant les résultats de tests effectués dans plusieurs pays européens, dont la France, où la pollution des eaux dépasse systématiquement les seuils de sécurité.
Le Ministère de la Transition écologique a répondu que la France suivrait attentivement les recommandations de l’ANSES, tout en rappelant que l’agence n’a pas encore été saisie pour évaluer la pertinence du TFA dans l’eau potable. Néanmoins, la pression pour prendre des mesures rapides et décisives s’intensifie, d’autant plus que les normes actuelles ne semblent pas adaptées à la réalité de la contamination observée.
Vers une nouvelle réglementation ?
Alors que les autorités françaises et européennes se penchent sur cette question, la question demeure : quand l’action sera-t-elle prise pour protéger les ressources en eau des Français contre ce polluant toxique et persistant ? L’interdiction du flufénacet pourrait être un pas important pour limiter la pollution à long terme, mais tant que des mesures de prévention et de traitement ne seront pas instaurées, plus de la moitié des Français risquent de continuer à consommer une eau non conforme aux normes sanitaires, avec les dangers que cela implique pour leur santé.
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