Certains acteurs du secteur du bâtiment plaident pour un report de l’entrée en vigueur des nouvelles exigences comprises dans la réglementation environnementale 2020. La faisabilité et la viabilité des constructions neuves responsables ont pourtant fait leur preuve, en témoigne le projet d’envergure du Village olympique.
Elle fait partie de ces grands textes structurants, de ceux qui façonnent l’avenir d’un pays tout entier. Entrée en vigueur le 1er janvier 2022, la Réglementation environnementale 2020 (RE2020) ambitionne de réduire l’empreinte carbone du secteur de la construction neuve. Pour ce faire, le gouvernement français a fixé aux acteurs de la filière des objectifs de sobriété énergétique et de décarbonation de l’énergie, mais aussi en termes de diminution de l’impact carbone et de garantie de confort lors des fortes chaleurs.
La RE2020 repoussée aux calendes grecques ?
Pouvant se targuer d’être l’une des premières réglementations mondiales à introduire la performance environnementale dans la construction neuve, la RE2020 s’inscrit dans une démarche globale, visant à atteindre d’ambitieux objectifs en matière de neutralité carbone. À ce titre, les exigences prévues pour 2025 – demain, donc – représentent une étape importante dans cette évolution, notamment en ce qui concerne la réduction attendue des émissions de CO2 par l’industrie du BTP.
Invoquant la crise, réelle, que traverse le secteur du BTP, avec un recul prévu de -5,5 % de la production de bâtiments neufs d’ici à la fin de l’année, la Fédération française du bâtiment (FFB) a, le 18 septembre dernier, « demandé officiellement de décaler (…) de trois ans » l’entrée en vigueur des nouveaux seuils d’exigences (énergie, carbone et confort d’été) qui devaient initialement s’imposer à partir des 1er janvier 2025, 2028 et 2031.
Un secteur très polluant
Si les arguments avancés par certains acteurs du BTP français s’entendent (sur les coûts et les difficultés d’adaptation notamment), l’urgence climatique ne peut être ignorée. Et avec 37 % des émissions mondiales de CO2, le secteur de la construction demeure l’un des principaux émetteurs de gaz à effet de serre (GES) et, comme le rappelait en mars dernier la directrice du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), « il n’y a pas de voie crédible pour lutter contre le changement climatique sans un changement majeur du bâtiment et de la construction ».
Un changement majeur, mais surtout urgent. La crise climatique exige en effet que soient engagées des actions rapides et immédiates, en particulier dans les secteurs les plus polluants. En France, le secteur du bâtiment représente à lui seul 23 % des émissions nationales de GES, d’après l’Ademe, ce qui fait de lui le troisième contributeur au réchauffement climatique. À l’image du béton, de l’acier ou du ciment, les matériaux utilisés par les professionnels du BTP sont en effet très gourmands en eau et en énergie fossiles, aggravant l’impact carbone des constructions neuves, et ce tout au long de leur cycle de vie.
Des conditions favorables déjà démontrées
Si les exigences comprises dans la RE2020 représentent, incontestablement, un défi pour l’ensemble du secteur du BTP, sont-elles pour autant insurmontables ? Non, si l’on en juge par le succès de récents chantiers d’envergure : ainsi, par exemple, du Village des athlètes édifié à l’occasion des Jeux olympiques de Paris, dont la livraison en temps et en heure a démontré qu’il est d’ores et déjà possible de construire de manière durable… et conforme aux nouveaux standards de la RE2020.
Dotés d’une ossature, d’isolations, de façades et de planchers majoritairement en bois, les bâtiments du village olympique parisien ont prouvé qu’il est possible de « répondre à quatre grands sujets », d’après Nicolas Ferrand, directeur de la société de livraison des ouvrages olympiques (Solideo) : « le carbone, comment on le diminue drastiquement, la question du dérèglement climatique, l’économie des matériaux, et la biodiversité ». En d’autres termes, les ressources et les techniques nécessaires pour respecter les normes RE2020 existent déjà, et elles sont viables même sur des projets de grande envergure.
Un impact économique délétère sur les bons élèves déjà engagés
Repousser l’application des exigences de la RE2020 n’a donc pas plus de sens du point de vue de leur faisabilité technique que du point de vue environnemental… et même économique. Les entreprises, comme celles de la filière bois et forêt, ont en effet investi pour être en accord avec la RE2020. Reporter l’application des nouvelles exigences pénaliserait ainsi ces acteurs, freinant leur dynamique, affaiblissant leur compétitivité et mettant en péril les emplois liés.
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