La pollution atmosphérique est désormais l’une des principales menaces sanitaires mondiales. Alors que se tient en Colombie la deuxième conférence mondiale sur la pollution de l’air et la santé, les experts tirent une nouvelle fois la sonnette d’alarme : l’air que nous respirons chaque jour est souvent nocif, voire mortel.
Une majorité de la population mondiale exposée
Selon les données de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), près de 99 % des êtres humains vivent dans des zones où la qualité de l’air dépasse les seuils recommandés. Ce chiffre vertigineux souligne l’ampleur du problème. En cause : des particules invisibles à l’œil nu, mais redoutables pour notre santé. Les plus connues, les PM2,5, mesurent moins de 2,5 microns, soit 0,0025 millimètre. Encore plus petites, les particules ultrafines atteignent parfois seulement 0,1 micron – une taille comparable à celle d’un virus.
Mais les polluants ne se limitent pas à ces particules solides. Des gaz comme le dioxyde d’azote (NO₂), le dioxyde de soufre (SO₂) ou encore l’ozone troposphérique participent eux aussi à la dégradation de la qualité de l’air. Tous ces éléments proviennent d’activités humaines variées : circulation automobile, chauffage, industrie, agriculture, sans oublier certaines sources naturelles.
Une hécatombe silencieuse
La pollution de l’air fait des ravages. Selon l’OMS, elle serait responsable de plus de 4 millions de décès prématurés chaque année. Ce chiffre grimpe même à plus de 8 millions lorsqu’on y ajoute les effets de la pollution intérieure, causée notamment par la cuisson au bois ou au charbon dans les foyers les plus modestes.
Ces morts ne sont pas réparties de manière équitable à travers le globe. Dans des pays très exposés comme l’Inde, le Bangladesh, le Népal ou le Pakistan, les habitants perdent en moyenne plus de 3,5 ans d’espérance de vie à cause de la mauvaise qualité de l’air. D’autres États comme l’Ouganda ou l’Arabie saoudite affichent aussi des pertes de plus de deux ans. Même en République démocratique du Congo, une amélioration de l’air aurait pu faire gagner près de trois ans de vie à la population.
Villes et campagnes également concernées
On associe souvent la pollution de l’air aux grandes métropoles, où les embouteillages et les zones industrielles concentrent les émissions. Pourtant, les campagnes ne sont pas toujours épargnées. L’utilisation massive de pesticides, les épandages agricoles ou encore les feux de végétation peuvent détériorer l’air ambiant.
De plus, la pollution ne respecte pas les frontières. Portée par le vent, elle peut parcourir de longues distances, rendant son impact encore plus difficile à maîtriser. Ainsi, un incendie ou une pollution urbaine peut affecter des zones rurales situées à des dizaines de kilomètres.
Des maladies bien au-delà des poumons
L’air pollué n’endommage pas seulement le système respiratoire. Les effets peuvent être immédiats lors des pics de pollution, provoquant des crises d’asthme, des infarctus ou des accidents vasculaires cérébraux. Mais c’est surtout l’exposition chronique qui inquiète les scientifiques.
Selon Isabella Annesi-Maesano, directrice de recherche à l’Inserm, l’inhalation régulière de particules fines est liée à une série de pathologies graves : maladies cardiovasculaires, diabète, cancers, troubles neurodégénératifs comme Alzheimer ou Parkinson, et même des maladies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde. Chez les femmes enceintes, la pollution peut entraîner des naissances prématurées ou un faible poids du bébé, avec des conséquences sur la santé future de l’enfant.
Cette toxicité s’explique par la capacité des particules ultrafines à franchir la barrière pulmonaire pour pénétrer dans le sang, puis se répandre dans tout l’organisme, touchant le cœur, le foie, le cerveau et d’autres organes.
Prévenir plutôt que subir
Face à ce fléau, la prévention reste essentielle. À l’échelle collective, la solution la plus efficace est bien sûr de réduire les émissions de polluants à la source : transports moins polluants, transition énergétique, limitation de l’usage de combustibles fossiles ou encore encadrement des pratiques agricoles.
À un niveau individuel, certaines habitudes peuvent aussi faire la différence. Éviter les rues très fréquentées aux heures de pointe, privilégier le vélo ou la marche dans des espaces verts, aérer son logement loin des pics de circulation, ou encore limiter l’usage de certains produits ménagers irritants. Enfin, mieux informer les citoyens sur la qualité de l’air en temps réel pourrait leur permettre d’adapter leur comportement au quotidien.
Un défi de santé publique mondial
La tenue de la conférence mondiale sur la pollution de l’air en Colombie souligne l’urgence de la situation. Il ne s’agit pas seulement d’environnement, mais d’un véritable enjeu de santé publique. La pollution de l’air est un tueur silencieux, qui affecte des milliards de personnes, souvent sans qu’elles en aient conscience. Agir aujourd’hui, c’est préserver la vie, la santé et l’avenir des générations à venir.
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